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par jour, et le nombre des journées de travail à quarante, nous trouvons que les terrassemens seuls durent occuper environ 9 000 travailleurs. Ajoutons la maçonnerie, les bois à transporter, tailler, ouvrer, mettre en place, les journées perdues, les mécomptes inévitables, et nous arrivons à un chiffre moyen de 15 000 travailleurs par jour. Ces hommes, il est vrai, pouvaient combattre. Les ateliers étaient établis à une certaine distance des murailles de la ville ; d’un des sommets occupés par les camps romains, il était facile de voir ce qui se passait dans la place : les préparatifs des sorties pouvaient être facilement découverts, et l’alarme sonnée aussitôt. Les travailleurs pouvaient quitter leurs outils et former leurs rangs assez à temps, sinon pour recevoir le premier choc de l’ennemi, au moins pour soutenir promptement les détachemens en armes qui devaient toujours les accompagner. La cavalerie romaine devait aussi être d’un grand secours pour rejeter dans la place les Gaulois, qui n’avaient plus que de l’infanterie. Enfin il faut considérer que les mouvemens de l’assiégé étaient ralentis par le fossé à fond de cuve que César avait jeté à quatre cents pieds en avant de la contrevallation. L’exécution de ce fossé, creusé en présence et à quelques toises de 80 000 ennemis, semble un tour de force. L’achèvement même de ce premier ouvrage était loin de paralyser Vercingétorix ; il avait du bois et du fer en abondance, puisqu’il employa des faux, des fascines et diverses machines dans sa dernière tentative. Il continuait d’occuper avec tout son monde le centre de la circonférence sur laquelle étaient disséminés les camps et les ouvrages de l’ennemi ; il était en face d’une armée nécessairement fatiguée, écrasée de gardes et de corvées. On s’étonne qu’ainsi posté et outillé, avec une garnison aussi considérable, il n’ait pas profité au moins de l’obscurité des nuits pour détruire fréquemment les ouvrages de l’ennemi et engager des actions dignes d’être rapportées par César. Ce dernier dit bien qu’il eut à repousser des sorties vives et fréquentes ; mais il ne paraît pas que ses travaux en aient jamais été sérieusement ralentis, ni que les Gaulois aient jamais tenté aucun effort proportionné à ce qu’ils essayèrent après l’arrivée de l’armée de secours.

Cette armée paraît enfin ; César la porte à 248 000 hommes, et au premier abord cette évaluation semble bien peu en rapport avec les résultats obtenus. Le premier engagement est une espèce de passe d’armes entre les deux corps de cavalerie, et l’inaction réciproque de l’infanterie s’explique facilement ; mais, lors de la surprise de nuit, comment tous les efforts sont-ils concentrés sur un seul point ? La dernière attaque est mieux combinée, quoique l’exécution en fût défectueuse. Les 60 000 hommes de Vercassivellaun, si heureuse-