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ZOBEÏDEH
SCENES DE LA VIE TURQUE

SECONDE PARTIE



I. — NAFIZE ET IBRAHIMA.

Après le mystérieux événement qui avait attristé sa maison, Osman-Bey ne fut pas longtemps à reprendre quelque empire sur lui-même. La surprise l’avait poussé à des démonstrations peu convenables, et il en eut d’autant plus de regret qu’il savait trop combien il serait dangereux pour les bonnes mœurs de son harem d’y laisser croire qu’une esclave infidèle y pût laisser quelque souvenir. Osman fit donc de louables efforts pour retrouver la gravité sereine qui le distinguait d’habitude ; mais s’il en retrouva les dehors, ce fut aux dépens de sa tranquillité intérieure. Soit qu’il se reprochât la mort d’Ombrelle, attribuée généralement à l’émotion et à la frayeur qu’il lui avait causées, soit qu’il souffrît gravement de la gêne qu’il s’imposait pour ne point paraître trop affecté par la mort d’une femme coupable, il est certain que son humeur devint de plus en plus sombre ; il perdit l’appétit, le sommeil, et sa santé en définitive s’en ressentit. Maléka, qui craignait les effets de cette tristesse invincible et les suites des distractions qu’il pourrait être tenté de chercher dans de nouvelles amours, le poussa prudemment vers la politique. Au début de sa carrière, Osman avait joui de la protection