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honorables, des négocians et des propriétaires de mines qui feraient honneur à tous les pays. Presque tous se sont bâti des hôtels aussi beaux que ceux qu’on trouve dans les plus grandes villes d’Europe ; les appartemens en sont élevés et spacieux, ils sont décorés avec goût et meublés de la façon la plus somptueuse : rien n’y est oublié ni des recherches du luxe, ni des commodités de la vie. La plupart de ces riches propriétaires mènent un train de vie en rapport avec la splendeur de leurs habitations : ils ont de vastes serres où ils entretiennent de riches collections de fleurs et de plantes des tropiques qu’on ne s’attendrait point à rencontrer sous ce climat rigoureux.

« Ekaterinenbourg renferme huit églises, un monastère et un couvent. Presqu’au centre de la ville un barrage coupe le cours de l’Issetz : c’est là que sont installés les ateliers de construction qui appartiennent au gouvernement. Ils sont organisés sur une échelle gigantesque : leurs machines et tout leur outillage sont l’œuvre des premiers constructeurs de l’Angleterre. On y trouve le marteau à vapeur de Nasmyth, des tours de la plus grande dimension, des machines à raboter, à forer, à canneler, à ajuster, tout ce qui peut servir à travailler ou à façonner le fer. Ces ateliers ont été montés, sans aucune préoccupation de la dépense, sous la direction d’un habile mécanicien anglais, qui est demeuré quinze ans au service du gouvernement russe. C’est à lui que l’on doit l’excellent outillage de l’hôtel des monnaies, qui frappe tous les ans une grande quantité de pièces de cuivre qu’on expédie en Russie. De la monnaie dépend un atelier d’affinage, où l’on apporte tous les métaux précieux des mines de l’Oural pour les réduire en lingots avant de les envoyer à Saint-Pétersbourg. »


Près des ateliers de construction se trouve la manufacture de Granilnoï, où l’on taille les jaspes, les porphyres, les aventurines et autres pierres de prix que l’on trouve en abondance dans l’Oural. On en fait des colonnes, des vases, des coupes, des tables pour l’ornement des résidences impériales. On tire le même parti des oolithes et des malachites. Il y a à Granilnoï des sculpteurs et des mosaïstes de premier ordre, qui passent des années sur un objet d’art : ils ont pour tout salaire 4 fr. 50 cent, et trente-six livres de farine de seigle par mois. S’ils sont pères de famille, ils reçoivent en sus trente-six livres de farine pour leur femme et dix-huit livres par chaque enfant. Encore est-ce là le salaire des ouvriers les plus habiles, la plupart ne sont payés qu’à raison de 2 ou 3 fr. par mois. Granilnoï appartient à la couronne, et tous les ouvriers sont choisis parmi les paysans.

Les pierres précieuses abondent dans certaines régions de l’Oural. Celles qu’on rencontre le plus fréquemment sont l’émeraude, l’améthyste, le béryl, le chrysobéryl et le grenat ; la topaze et la tourmaline rose sont plus rares ; l’aigue-marine est apportée de Nertchinsk en Sibérie. On trouve aussi des quartz d’une telle pureté et d’une telle transparence, qu’ils peuvent être pris pour des topazes, et qu’ils en reçoivent le nom. On en fait des cachets fort