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LA SIBERIE
ET
LES PROGRES DE LA PUISSANCE RUSSE
EN ASIE

Seven Years in Western and Oriental Siberia, by Witlam Atkisson, London 1857.



Deux siècles et demi se sont écoulés depuis le jour où le Cosaque Yermak et ses compagnons, abandonnant les gorges de l’Oural, pénétrèrent en Asie et conquirent à la Russie les plaines immenses qui s’étendent jusqu’à la Mer-Glaciale et jusqu’à l’Océan-Pacifique ; mais la Russie, occupée de son développement intérieur, désireuse par-dessus tout de se mêler au mouvement des affaires européennes, négligea longtemps cette possession lointaine. Semblable à ces parvenus qui cherchent à effacer les traces de leur origine, elle paraissait craindre de compromettre ses droits au titre de puissance européenne en donnant quelque attention à ses provinces d’Asie. Les regards uniquement tournés vers l’Occident, la Russie, jusqu’aux trente dernières années, n’a paru songer à la Sibérie que pour en faire un lieu de déportation pour ses criminels, un lieu d’exil pour ses condamnés politiques ou ses prisonniers de guerre. Aussi le nom de Sibérie n’éveille-t-il que les idées les plus lugubres : il fait apparaître à l’esprit des contrées déshéritées du soleil, en proie à un hiver presque perpétuel, où l’homme dispute péniblement sa vie aux bêtes fauves, et où le regret de la patrie perdue vient s’ajouter aux rigueurs d’un climat implacable. La moindre réflexion devrait