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dans la province de Rio-Janeiro[1]. Les données officielles présentent le nombre de près de 40,000 colons arrivés pendant ces quatre dernières années dans ces centres de colonisation et dans plusieurs autres qui commencent à se former, et qui sont appelés à un avenir aussi prospère : de ce nombre sont ceux de M. le prince de Joinville sur les terres de Sainte-Catherine, qu’il a reçues en dot de Mme la princesse de Joinville ; celui de Mundo-Novo dans la province d’Espirito-Santo, et celui du Jatahy dans la province de Paraná.

Il y a maintenant une question morale qui domine toute la colonisation. Les institutions brésiliennes reconnaissent une religion de l’état : c’est la religion catholique, qui est celle de la grande majorité des habitans. Ces institutions permettent aussi l’exercice des autres religions, mais elles n’accordent qu’aux catholiques l’accès aux chambres et aux autres fonctions publiques. Pour le moment, la nécessité de modifier cette disposition constitutionnelle ne s’est pas encore fait sentir : l’avenir en décidera ; mais la colonisation ouvre le pays à toute espèce de religion, et cependant le clergé est encore en possession des livres sur lesquels on inscrit les actes de mariage, de baptême et de décès. Que la religion intervienne dans ces momens solennels de la vie humaine, que le clergé dresse les actes qui les constatent, rien de mieux ; mais ces actes ne pourraient-ils pas, pour que la validité en fût mieux assurée, être précédés ou suivis d’actes passés devant les autorités civiles ? En quoi la loi civile gênerait-elle l’action des représentans de l’église ? Ne pourrait-on pas aussi aplanir les difficultés que rencontrent les mariages conclus entre individus non catholiques ? La loi brésilienne ne reconnaît comme valables que les actes de mariage passés par les ministres de la religion catholique. Comment établir cependant la validité des mariages qui ne nécessitent pas l’intervention de ces ministres, si un acte civil ne peut servir à les constater, en garantissant les droits de l’époux, de la famille et des héritiers ? Il importe d’assurer, d’accord avec le saint père, l’intervention de l’autorité civile dans les mariages des catholiques, soit entre eux, soit avec des personnes, d’une autre religion. Pour les autres, le pouvoir politique ne peut-il seul et librement prendre les mesures convenables ? Nous faisons des vœux pour que ces questions soient promptement résolues, car les laisser pendantes, c’est compromettre la colonisation spontanée, surtout la colonisation allemande, et avec elle l’avenir du pays.

  1. Dans le rapport que nous avons déjà cité, on voit que la colonie de Pétropolis a une population allemande de plus de 3,000 âmes, et celle de Friburgo en a presque autant.