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se concentre en quelque sorte en certains points qui sont le siège des phénomènes volcaniques. C’est à M. de Humboldt qu’on doit d’avoir élargi la définition de la volcanicité, et de l’avoir appliquée à toutes les réactions que fait naître une communication constante ou périodique entre les régions souterraines de notre planète et l’atmosphère qui l’environne. Les jets intermittens d’eau chaude, tels que le grand Geyser et le Strokkr en Islande, peuvent donc déjà être considérés à bon droit comme des phénomènes subordonnés à la volcanicité terrestre. À un degré plus élevé, il faut placer les sources de gaz auxquelles on donne encore le nom impropre de salses. Elles émettent par de petites ouvertures coniques, véritables volcans en miniature, des matières très diverses, de la vapeur d’eau, du sel marin, du soufre, des combinaisons de soufre et de carbone avec l’hydrogène, de l’acide carbonique, de l’azote, de la naphte, de l’acide borique, ou simplement de la boue. Les vapeurs qui sont rejetées par ces petits soupiraux varient parfois à d’assez courts intervalles. Quand M. de Humboldt visita les volcancitos de Turbaco, à peu de distance du port de Cartagena de Indias, le mélange gazeux qui s’en échappait n’était point inflammable. Joachim Acosta, qui visita la même localité en 1850, put enflammer ces gaz avec une grande facilité. Parrot ne put allumer en 1811 ceux qui sortent des volcans boueux de la presqu’île de Taman. Gobel, vingt-trois ans après, les trouva inflammables. Les contrées les plus riches en sources volcaniques, si ce mot pouvait être employé, sont la Sicile, le Modenais, la région qui avoisine le Caucase, l’Islande, l’île de Java et la Chine. Il y a longtemps que, dans ce dernier pays, on a inventé des procédés de sondage très ingénieux pour aller chercher à d’immenses profondeurs du gaz d’éclairage et du sel marin, et créer en quelque sorte des salses artificielles.

L’expression la plus complète de l’activité souterraine doit être cherchée dans les volcans eux-mêmes ; mais elle y revêt aussi des caractères très variables. Quand la pression continuelle des matières souterraines parvient à vaincre en un point de la terre la résistance des parties solides qui en forment l’enveloppe, les couches superficielles se soulèvent sous forme de montagne arrondie : la première éruption, pareille à l’explosion d’une mine, arrache la partie supérieure de cette protubérance ; c’est à l’entonnoir qui se trouve ainsi ouvert au sommet du volcan que l’on donne le nom de cratère de soulèvement. Au centre de ces cirques s’élèvent en dôme les matières souterraines que recouvrent bientôt les débris incohérens rejetés par le volcan ; mais la nature ne procède pas toujours de la même manière. Quelquefois la première explosion rejette une telle abondance de débris, que le terrain, au lieu de garder la forme d’un cône de soulèvement, s’écroule et s’affaisse en masse. M. de Humboldt donne à ces cavités le nom de cratères-lacs, parce qu’ordinairement elles sont remplies d’eau. Dans ce nombre, on peut citer les lacs qu’on rencontre dans la région volcanique de l’Eifel, et qui portent le nom de maaren.

Il faut que l’émersion des roches souterraines s’opère sans trop de violence pour qu’un volcan conserve un véritable cratère de soulèvement : aussi l’on peut remarquer que ceux qui rentrent dans cette catégorie n’ont jamais qu’une hauteur moyenne ; mais quand les matières souterraines se sont fait jour avec une très grande force et se sont élevées à une très grande