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THOMAS BROWNE
LE MEDECIN PHILOSOPHE DE NORWICH

The Works of sir Thomas Browne (Œuvres de sir Thomas Browne), éditées par Simon Wilkin F. L. S. 2 vol., Londre 1852.



Les ressuscités, les écrivains qui renaissent soudain de leurs cendres, comme notre vieux Ronsard, sont une partie intéressante et fort significative de la littérature de chaque époque. Ils ont beau n’être que d’étranges contemporains d’outre-tombe qui parlent sans pouvoir entendre, qui influent sur la génération et qui n’ont subi aucune de ses influences ; ils sont souvent plus actuels que les vivans eux-mêmes. Il est possible qu’un homme de chair et d’os soit une exception et un anachronisme au milieu de son siècle ; mais un auteur mort qui reprend en quelque sorte une seconde existence ne saurait être sans parenté avec les temps où il revoit le jour : si l’ombre est sortie de sa tombe, c’est seulement parce qu’elle a été évoquée, et maintenant, comme à l’époque d’Orphée, il n’y a que l’amour qui ait le don de rendre les morts à la vie. Que signifient pourtant ces alternatives de popularité et de discrédit ? comment expliquer la destinée de ces hommes qui étaient tombés dans l’oubli après avoir été glorifiés, et qui, avec la même voix que nos pères entendaient sans émotion, ont retrouvé tout à coup la puissance de nous remuer ? A mon sens, il y aurait hâte et présomption à ne voir là qu’une erreur commise et rectifiée, à nous dire simplement que ces écrivains avaient été dédaignés parce que nos pères ne savaient pas distinguer leurs mérites, et qu’ils sont rentrés en honneur parce que nous avons su reconnaître la valeur qui n’avait jamais cessé