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ou qui ouvraient les abords de la Lombardie. Les impériaux, maîtres d’Alexandrie, de Novare, de Vigevano, de Milan, de Pavie, de Plaisance, de Parme, tenaient la plus grande partie du duché, ils avaient pour eux les habitans du pays. Ceux-ci, dans leur exaltation d’indépendance nationale, voulaient être gouvernés soit par le duc Francesco Sforza, soit par le saint-siège. Le dévouement zélé des populations italiennes, très animées en ce moment contre la domination française, était soutenu par des garnisons suffisamment nombreuses. Des ouvrages de défense avaient été préparés en outre avec beaucoup de prévoyance autour des villes[1]. Prospero Colonna n’avait rien négligé pour mettre les plus importantes d’entre elles à l’abri d’une surprise soudaine et même d’une attaque régulière.

Encore plus propre à garder un pays qu’à le conquérir, Prospero Colonna était un général fort habile, surtout dans la guerre défensive. Il se postait bien, manœuvrait savamment, et il se rendait capable de l’emporter sur ses ennemis beaucoup moins par la valeur ou la supériorité de ses troupes que par l’art qu’il mettait à les placer, à les conduire, à les engager. Il avait entouré la citadelle de Milan d’un double cercle de tranchées profondes, pratiquées à une certaine distance les unes des autres et surmontées de plates-formes armées de canons, empêchant ainsi de pénétrer par le dehors dans la citadelle et de faire de la citadelle aucune sortie contre la ville. Il avait relevé les remparts, creusé les fossés, réparé les bastions de Milan[2], où il s’était enfermé avec douze mille hommes de pied, sept cents hommes d’armes et sept cents hommes de cavalerie légère. Le reste de l’armée impériale était distribué dans Alexandrie, que gardait Monsignorino Visconti avec deux mille hommes, dans Novare, où Filippo Torniello en commandait quinze cents, dans Pavie, que défendait l’intrépide et opiniâtre Antonio de Leiva à la tête de trois mille.

Les moyens d’accroître le nombre de ses troupes n’avaient pas été négligés non plus par Prospero Colonna. Autant que l’avaient permis les faibles ressources des impériaux, à défaut de fantassins suisses, on levait des lansquenets allemands. Deux hommes poursuivaient ces levées avec ardeur : Francesco Sforza, qui dans le succès de cette guerre voyait le rétablissement solide de sa maison en Lombardie, et Jérôme Adorno, qui aspirait à faire dans Gênes la révolution opérée, au nom de Francesco Sforza, dans Milan. Avec une somme assez peu considérable qu’envoya l’empereur, un subside

  1. Guicc, lib. XIV. — Gal. Capella, lib. II, fol. 1265. — Belcarius, Comment, rer. .Gall., lib. XVII, fol. 503.
  2. Gal. Capella. lib. II, fol. 1265. — Guicc, lib. XIV.