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clopédiste aligne de formidables bataillons d’équations dans un problème où les données premières, il est permis de le dire, c’est-à-dire les faits d’observation, manquaient alors absolument. N’oublions pas, également dans le siècle dernier, un nom bien complètement inconnu aujourd’hui, celui du chevalier de La Coudraye, qui, se plaçant à un point de vue plus général que ses devanciers, sut mêler à d’inévitables erreurs des idées neuves et vraies, dont il est juste de lui tenir compte.

Rechercher la cause des vents alors que l’on admettait dans leur action une irrégularité presque entière, cela peut paraître de nos jours un problème étrangement posé. Quant à la raison qui s’opposait à ce que la connaissance du phénomène fût plus complète, nous avons déjà eu plusieurs fois l’occasion de la signaler : c’était l’absence de données, c’était le manque de toute compilation, et par suite, sauf quelques rares exceptions, l’inutilité absolue des observations recueillies par les navigateurs. Dès le début, Maury replaça la question sur son véritable terrain, et grâce à son merveilleux esprit de généralisation, grâce à l’application des seules méthodes véritablement scientifiques que comporte l’étude des phénomènes de la nature, il parvint à présenter les lois qui régissent la circulation atmosphérique sous la forme d’un système rationnel dont le majestueux ensemble n’avait été jusqu’à lui soupçonné par personne[1]. C’est ce système que nous allons exposer.

Il est généralement admis aujourd’hui que la vaste enveloppe atmosphérique au milieu de laquelle se trouve notre globe est dans un état incessant d’agitation ; même dans ce qui nous paraît être le calme le plus parfait, l’exquise sensibilité de certains anémomètres accuse un mouvement perceptible, et montre que dans la masse aérienne le repos absolu n’existe pas. Or, de ces mouvemens, les seuls que nous puissions constater directement sont ceux qui s’opèrent à la surface du globe : ce sont les données de notre problème, et ce sont eux qui doivent nous conduire par induction à la connaissance des mouvemens qui s’opèrent dans les régions supérieures de l’atmosphère. Disons tout de suite que la hauteur de cette atmosphère (100 kilomètres environ) rend parfaitement admissible l’existence de deux systèmes de courans aériens superposés pour ainsi dire ; nous établirons bientôt que de plus cette existence est nécessaire : il faut d’abord indiquer quels sont les vents que l’observation nous montre à la surface du globe.

En se plaçant au point de vue le plus général, c’est-à-dire en

  1. Il serait pourtant injuste de ne pas mentionner ici M. Le capitaine de vaisseau Lartigue, qui a publié en 1840, sous le titre d’Essai sur le système des vents, une brochure dont l’Académie des Sciences a fait l’objet d’un éloge mérité.