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En même temps il réclama l’assistance d’Henri VIII, que Charles-Quint demandait de son côté. Le roi d’Angleterre avait promis de se déclarer contre celui des deux qui serait l’infracteur de la paix. Lequel l’avait été? Ils s’en défendaient également l’un et l’autre, et chacun prétendait que l’agression venait de son adversaire. François Ier alléguait l’inexécution du traité de Noyon de la part de Charles-Quint, qui ne lui payait pas les sommes dues pour le royaume de Naples, et qui, depuis quatre ans, ne donnait aucune satisfaction aux d’Albret pour le royaume de Navarre. Il ajoutait que les généraux de l’empereur avaient paru en armes sur son territoire, y avaient pris Mouzon, Saint-Amand, Mortagne, Ardres, et y assiégeaient Tournai. Charles-Quint soutenait que les premières hostilités venaient des Français. Il attribuait la rupture de la paix à l’expédition de Lesparre au-delà des Pyrénées et à l’entrée de Robert de La Marck dans le Luxembourg. Quant à lui, attaqué dans ses états, il avait été contraint pour les défendre de pénétrer sur les états de son ennemi.

Sommé de venir en aide aux deux rois, Henri VIII[1] se montra en apparence incertain. Il refusa à François Ier les secours qu’il lui demandait, et il répondit à son ambassadeur que, « s’étant obligé par serment à prêter assistance au prince qui n’aurait point rompu les traités, il ne pouvait déterminer s’il devait l’accorder au roi très chrétien ou à l’empereur, jusqu’à ce qu’il sût parfaitement lequel des deux les avait enfreints, afin de sauver sa conscience devant Dieu et son honneur devant les hommes[2]. Il en prit prétexte de se faire juge entre ses alliés et leur imposa sa médiation. Il les pressa l’un et l’autre d’envoyer leurs plénipotentiaires à Calais, où ils trouveraient son ministre, le cardinal d’York, prêt à les entendre. Charles-Quint s’y refusait d’abord. Fort irrité de la perte de la Navarre, dont il ne connaissait pas encore le recouvrement, il rejetait toute apparence de négociation et ne voulait que combattre. « Le roi très chrétien, disait-il, m’a pris un royaume, mais j’aurai ma revanche[3]. » Instruit toutefois des dispositions secrètes de Henri VIII,

  1. François Ier envoya Olivier de La Vernade, seigneur de La Bastie, auprès du roi d’Angleterre pour réclamer son assistance. La mission de La Bastie est dans les mss. Béthune, vol. 8491, fol. 47 à fol. 66. Charles-Quint, de son côté, dépêcha à Henri VIII l’audiencier Hanneton (State Papers, vol. I, fol. 17). « Le roy catholicque a envoyé son audiencier icy pour demander ayde et secours au dict roy vostre hon frère. » Lettre d’Olivier de La Vernade écrite de Londres le 5 juillet à François Ier, mss. Béthune, vol. 8491, fol. 50.
  2. C’est ce qu’écrivait Rich. Pace, qui était auprès d’Henri VIII, à Wolsey demeuré à Londres, le 20 juillet 1521. State Papers, t. Ier, p. 12.
  3. Dépêche d’Olivier de La Vernade à François Ier du 28 juin 1521, mss. Béthune, vol. 8491, fol. 176.