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les autres états à l’origine de l’histoire anglo-saxonne. Des coquilles apportées de l’Océan-Indien, des pièces de monnaie venues de Constantinople et de la Germanie, tout annonce, même sous la période païenne, un commerce étendu avec le reste du monde. Ces traces du génie aventurier et commerçant ne doivent point être perdues de vue par le moraliste, quand il s’agit des ancêtres directs de la nation anglaise. On retrouve dans les tombeaux saxons et dans les richesses naissantes qui les accompagnent l’aube de la prospérité matérielle d’un grand peuple.

Les barrows anglo-saxons forment en général, à côté de ceux dont les antiquaires rapportent l’origine aux Romains et aux Saxons, un groupe de caractère distinct. Ils furent les prototypes des sépultures modernes telles qu’on les rencontre aujourd’hui en Angleterre dans les cimetières de campagne. Les anciens Saxons creusaient dans la terre une fosse, variant de trois ou quatre pieds à sept ou huit pieds de profondeur ; là ils couchaient sur le dos le cadavre revêtu de ses plus beaux habillemens. Ils l’entouraient en outre d’une variété d’objets choisis, on a lieu de le croire, parmi ceux que le mort avait préférés durant sa vie : or ce que le barbare aimait le mieux, c’étaient ses armes. On recouvrait ensuite la fosse, et une élévation de terre marquait aux yeux la place où le défunt dormait du dernier sommeil. En visitant les cimetières de village dans la Grande-Bretagne, je me suis arrêté plus d’une fois devant des tertres sinistres ayant à peu près la même forme et recouverts de gazon. Qui reposait là ? L’église voisine seule répondait : un chrétien. Deux modes d’inhumation existaient chez les anciens Saxons durant l’ère païenne ; tantôt ils enterraient le corps entier et tantôt ils le brûlaient. Il faut ajouter que les funérailles étaient souvent accompagnées d’une immolation d’esclaves.

La race anglo-saxonne se distingue jusque dans la mort des deux autres races avec lesquelles elle se trouva en contact sur le sol de la Grande-Bretagne, les Celtes et les Romains. Il existe sous le sanctuaire de l’église Saint-Léonard, à Hythe, une crypte qui contient des crânes et des ossemens humains. Ces restes n’appartiennent point à une seule et même race. Deux formes de crânes prédominent : l’une, étroite et allongée, appartient au type celtique tel qu’il existe encore aujourd’hui dans la Grande-Bretagne ; l’autre, courte et large, se rapporte au type anglo-saxon. Une troisième sorte de crânes, en petit nombre, est évidemment d’origine romaine ; nous avons là sous les yeux le point de contact, sinon le terrain d’assimilation des trois familles ou des trois peuples. On a aussi déterré en 1844, à Fairford, dans le Glocestersbire, tout un cimetière considérable qui remonte aux premiers temps de l’invasion saxonne,