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orientale des Celtes est attestée par leur langage, dans lequel on retrouve des traces du sanscrit[1]. Quelques-unes de ces tribus plus ou moins errantes, poussées sans doute par d’autres tribus qui leur disputaient le terrain, passèrent jusque dans la Grande-Bretagne. L’opinion de Prichard est que les Celtes irlandais constituaient une famille particulière, distincte des Celtes bretons et gaulois, avant même que les uns et les autres quittassent l’Asie. Il y a des raisons de croire qu’ils arrivèrent dans l’Europe occidentale avant les Welches, et qu’ils trouvèrent le chemin de l’Irlande en traversant l’Espagne et en croisant la baie de Biscaye : cette expédition a fourni aux anciens romanciers et aux bardes irlandais plus d’un épisode homérique. De l’Irlande, ce groupe de Celtes passa, au IIIe siècle de notre ère, dans l’ouest de l’Écosse et dans l’île de Man (l’île de l’Homme).

Nous venons d’entrevoir la race morte ; comparons-lui maintenant la race vivante. Et quel pays se prête mieux que la Grande-Bretagne à cette nouvelle perspective de faits ? Les restes des anciens monumens bretons s’effacent de jour en jour et partout sous la charrue ; mais ici la famille celtique persiste. Nous la retrouverons sur trois grands théâtres, où elle continue la série de ses développemens, l’Irlande, l’Écosse, l’île de l’Homme. C’est en Irlande, surtout vers la côte ouest, qu’on rencontre le rameau le plus intact des Celtes gaéliques. Connaught, par exemple, situé sur l’Atlantique, se trouve depuis des siècles à l’abri de toute infusion de sang étranger, si ce n’est celui qui peut venir du côté du nord et de l’est : encore cette introduction de l’élément étranger a-t-elle été insignifiante. Là nous découvrons donc le Celte de la verte Érin dans sa forme typique. Comme l’Irlande, l’Écosse est gaélique, du moins si l’on regarde à sa population indigène ; mais la souche est moins pure qu’en Irlande. Si le mélange de sang anglais dans les highlands et les îles de l’ouest a été faible, l’accession du sang scandinave a été considérable. Il en est de même dans l’île de Man, où se retrouve la troisième variété de la moderne population celtique.

Dans le pays de Galles, l’idiome diffère du dialecte qui est parlé en Écosse, en Irlande et dans l’île de l’Homme. Le langage d’un Breton des Wales est tout à fait inintelligible pour un Gaël, et un Gaël ne peut se faire entendre d’un Breton, tandis qu’un Celte irlandais et écossais se comprennent l’un l’autre. Ces derniers saisissent de même, quoique avec quelques efforts, le langage d’un habitant de l’île de Man. On peut donc considérer le rameau des Welches comme une branche distincte du tronc celtique : aussi l’appelle-t-on

  1. Voyez the Eastern Origine of the Celtic nations proved by a comparison with the sanskrit, greck, latin and teutonic languages, by James Cowles Prichard.