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charbon étaient spontanément entrés dans la voie de la bienfaisance, en créant pour leurs ouvriers des caisses de secours et de retraite, des hospices, des écoles pour l’éducation des enfans, en faisant bâtir des villages d’ouvriers, comme à Anzin notamment, en s’imposant enfin des sacrifices dans toutes les circonstances où la cherté des céréales compromettait le sort des classes nécessiteuses. Les grandes compagnies se font particulièrement et naturellement remarquer par leur sollicitude pour les ouvriers qu’elles occupent, et je dois mentionner au premier rang parmi celles-ci la compagnie des mines d’Anzin et celle des mines de la Loire. Seule, la première n’a pas institué de caisse de prévoyance, mais elle prend à sa charge tous les frais résultant des secours, des soins médicaux, des pensions dont les mineurs peuvent avoir besoin, ainsi que leurs familles. La seconde, — à l’instar du reste de la plupart des concessionnaires de mines, grands ou petits, qui ne se sont pas laissé rebuter par la résistance peu intelligente des ouvriers, au point de vue même de leurs intérêts, — avait organisé un système complet de prévoyance. Une caisse était alimentée par une retenue sur le salaire de chaque mineur, par le produit des amendes disciplinaires qu’encourt le personnel, par les dons de l’état, du département, des communes et des particuliers, enfin par une subvention volontaire de la compagnie, égale annuellement à la somme totale des retenues versées par les ouvriers. Cette caisse faisait face aux dépenses occasionnées par les soins médicaux donnés aux mineurs blessés ou malades et à leurs familles, par les secours en argent qui pouvaient leur être attribués suivant de certaines règles, par les indemnités pécuniaires accordées aux veuves et aux enfans des victimes d’accidens, etc. L’administration de la caisse était confiée à un conseil formé en partie au sein même de la compagnie et en partie parmi les ouvriers par la voie de l’élection, et les droits aux secours étaient l’objet d’un règlement détaillé. On retrouve les mêmes principes à peu près dans toutes les institutions de ce genre, mais les applications varient à l’infini. Ainsi la retenue sur les salaires est de 2 pour 100, de 3 pour 100 ou de 4 pour 100 ; la compagnie générale des mines de la Sarthe et de la Mayenne fait, suivant les usages locaux, une retenue de 5 pour 100, et subvient alors à toutes les dépenses qu’entraîne le service de secours. Du reste, toutes ces mesures n’empêchent pas la misère d’entrer au logis de l’ouvrier malade, car une allocation quotidienne de 50 centimes, de 75 centimes ou même de 1 franc, ne suffit pas pour faire vivre celui qui est devenu momentanément incapable d’exercer sa profession, alors même, quand il est marié, qu’il est aussi alloué à la femme et aux jeunes enfans une somme de 25 centimes.