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empêche que cette importance relative passe du domaine géologique dans le domaine industriel. Les mines y sont généralement si peu riches, que la plupart des habitans de deux villages voisins d’un groupe de ces exploitations « se chauffent, dit M. Elie de Beaumont, pendant un hiver de neuf mois, avec de la fiente de vache desséchée au soleil. Afin d’avoir moins froid, ils habitent dans leurs étables. » On ne s’étonnera donc pas de voir le bassin des Alpes figurer seulement dans la production française en anthracite pour un peu plus du quart, c’est-à-dire pour fort peu de chose dans l’extraction indigène des combustibles minéraux.

Il ne me reste plus à parler que du lignite, combustible minéral qui peut, sans anomalie aucune, appartenir à la formation secondaire, mais qui se trouve plus ordinairement disséminé dans la formation tertiaire, notamment dans l’argile plastique, où sa présence accidentelle est la cause de ces recherches de houille qui ont été tentées à plusieurs reprises dans le bassin de Paris. Les explorateurs, — je parle de ceux qui étaient honnêtes, mais ignorans, — étaient trompés par l’extrême ressemblance qui existe dans certains cas entre le lignite et la houille. En effet, ce combustible, dont l’aspect est très variable, tient tantôt du bois fossile, tantôt de la houille ordinaire. Dans le premier cas, il ressemble à du bois dont la couleur serait foncée, et se rapproche tout à fait de la tourbe ; il est telle mine de lignite où l’œil distingue très nettement l’essence du bois fossile, et où l’outil d’abatage du mineur est pour ainsi dire la hache du bûcheron. Dans le second cas, le lignite a véritablement l’aspect de la houille, bien qu’un œil exercé y retrouve généralement la texture du bois ; néanmoins il peut arriver que les traces de la structure organique des végétaux, qui n’ont plus le caractère de ceux des terrains anthracifère et houiller, mais sont au contraire analogues à ceux de la période actuelle, soient à peine visibles et même disparaissent tout à fait. Il en est particulièrement ainsi pour les lignites de la Provence, qui forment le plus remarquable des îlots de ce combustible spécial connus en France. Sans aucune importance commerciale et n’ayant, à un degré encore moindre que l’anthracite, qu’une valeur purement locale, qui pourra cependant croître avec les progrès de l’industrie, le lignite n’existe pour ainsi dire qu’à l’état d’accident géologique. Les dépôts ne présentent plus cette continuité et ces roches caractéristiques que nous avons remarquées dans les terrains carbonifères anciens ; aucun indice ne vient donc guider l’explorateur, qui n’a plus rien à attendre des notions géologiques, et que le hasard seul peut servir. Enfin l’épaisseur des gîtes est infime. Ce combustible est malheureusement le seul dont il soit possible d’espérer l’existence dans le nord de l’Algérie, où aucun lambeau de terrain houiller n’a encore été constaté.