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LA DÉVASTATION
ÉPISODES ET SOUVENIRS DE LA GUERRE D’ORIENT.

I.

UNE BATTERIE FLOTTANTE DE CHERBOURG À SÉBASTOPOL.



I. — la mise a la mer et le départ.

Écrites sans prétention aucune, même sans arrière-pensée de publicité, les pages qu’on va lire auraient pu aisément se transformer en une sorte de récit romanesque, au lieu d’offrir de simples notes consignées presque jour par jour dans les loisirs monotones d’une longue traversée. Peut-être préférera-t-on cependant à une mise en scène plus savante les confidences familières d’un journal de bord. Peut-être aussi trouvera-t-on à lire ces feuilles volantes un peu du plaisir que j’ai eu à les écrire tantôt en pleine mer, tantôt dans les escales du curieux bâtiment qui sera le principal héros de cette histoire.

Un sous-ingénieur du port de Cherbourg, M. Eugène Antoine, commençait, le 5 septembre 1854, les premiers travaux de construction de la batterie flottante la Dévastation. À cette époque, tandis que la guerre se poursuivait en Crimée avec un acharnement sans exemple, une escadre anglo-française attendait, en vue de Cronstadt, que les flottes du tsar, moins promptes à engager la lutte que son armée de terre, quittassent enfin leur mouillage. La batterie flottante que l’on construisait à Cherbourg allait, de concert avec quelques autres bâtimens du même modèle, réaliser une pensée de