l’élévation morale de l’écrivain qu’à la sûreté de son jugement. Il y a quatorze ans que M. Mügge rédigeait ce manifeste ; l’Aftonblad et les autres journaux libéraux de Stockholm auraient pu le publier, il y a deux mois, à propos de la discussion des états sur la liberté religieuse. M. Mügge est protestant ; c’est au nom du protestantisme qu’il condamne le clergé suédois. Il éprouve les plus vives sympathies pour la Suède ; c’est avec une sollicitude attristée qu’il lui adresse de sévères remontrances.
Malheureusement l’ouvrage de M. Théodore Mügge a passé à peu près inaperçu, ou du moins, si on l’a lu avec plaisir, il n’a pas réveillé, au sujet des affaires de Suède, l’attention un peu languissante de l’Allemagne. L’Allemagne était prévenue que le pays de Geijer et de Tegner échappait à son influence ; elle n’a rien fait pour ressaisir la direction intellectuelle et morale qu’elle exerçait naguère. C’est à peine si, de loin en loin, dans les conférences pastorales de Berlin, un ministre de l’Évangile, après un voyage à Stockholm, racontait les persécutions exercées par le clergé suédois contre des protestans non conformistes. On écoutait le récit du voyageur, puis l’assemblée passait à l’ordre du jour. L’Allemagne entière a fait de même. Il y a quelques mois à peine, un livre fort intéressant a paru sous ce titre : Annales historiques de Gotha. C’est une histoire politique des divers états pendant l’année dernière, histoire composée à peu près sur le modèle de l’Annuaire des Deux Mondes, quoique bien moins complète, bien moins riche de renseignemenset d’idées. L’auteur, M. le docteur Aurélio Buddeus, est un publiciste intelligent ; il a eu entre les mains des documens précieux, certaines parties de son livre sont fort bien traitées. J’ai lu le chapitre consacré à la Suède, croyant y trouver l’opinion de l’Allemagne sur cette question de la liberté religieuse, qui en ce moment même passionnait la diète de Stockholm : qu’ai-je trouvé ? Quelques lignes à peine. L’auteur signale, il est vrai, l’inflexible fanatisme du clergé suédois, mais il ajoute, en forme d’excuse, que ce fanatisme a ses racines dans le cœur de la nation. Le peuple le veut, il faut se soumettre. Un tel langage, et dans un pareil livre, révèle une indifférence qu’on a peine à concevoir.
Il a fallu que la liberté de conscience (ou du moins un adoucissement des peines ecclésiastiques, un amendement Il la loi barbare qui tyrannise les âmes) ; il a fallu, dis-je, que cette liberté si incomplète encore, proposée 4 la Suède par le roi Oscar, fût solennellement repoussée par les états ; il a fallu les scandales de cette discussion et de ce vote pour arracher l’Allemagne à son indifférence. Dès que le débat s’est ouvert, il y a deux mois à peine, l’attention des publicistes et des théologiens s’est éveillée. La discussion a été suivie avec une sollicitude inquiète, et enfin, lorsque le vote du 31 octobre qui rejetait la proposition royale a été connu à Vienne et à Berlin, un cri de douleur et de reproche est sorti de toutes ces lèvres jusque-là silencieuses. Rendons hommage aux journaux de l’Allemagne du nord, principalement au Correspondant de Hambourg, au Journal national de