Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 13.djvu/361

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

terre catalogués par M. Junghuhn, trois seulement ont annoncé, deux ont suivi, dix-neuf ont accompagné les éruptions ; cent neuf se sont produits tout à fait isolément.

Au lieu de courans de laves, ce sont des torrens de boue qui descendent pendant certaines éruptions des volcans javanais et inondent souvent tous les alentours. L’origine de ce singulier phénomène est encore enveloppée d’une certaine obscurité. L’eau sort-elle du volcan à l’état de vapeur, et forme-t-elle des torrens boueux en retombant à l’état de pluie et en entraînant les cendres volcaniques rejetées.pendant l’éruption qu’elle rencontre sur son passage ? ou bien ces fleuves de boue liquide s’épanchent-ils des cratères absolument comme des courans de lave ordinaire ? M. Junghuhn penche pour la première opinion ; mais ses descriptions mêmes semblent la combattre : les grandes vallées de déchirement qui découpent les flancs des volcans javanais sont remplies par une multitude de pierres et de rochers amoncelés. Si la pluie avait entraîné ces débris, ils seraient en plus grande abondance sur les pentes les plus basses de la montagne, et l’on ne devrait pas en trouver auprès du sommet. Ces champs de débris s’élargissent au contraire très souvent à mesure qu’on se rapproche de la cime, et on peut les suivre jusque dans l’intérieur même des cratères, qui en sont quelquefois entièrement remplis. Ces blocs, qui n’ont aucun des caractères des scories volcaniques ordinaires, étaient sans doute suspendus dans une masse demi-pâteuse, demi-fluide, qui s’écoulait par les échancrures du cratère.

On remarque parfois sur les pentes les plus basses des montagnes volcaniques une multitude de petits monticules dont les Javanais expliquent ainsi la formation : quand le courant boueux rencontre quelque obstacle, tel qu’un arbre ou un bloc de rocher, les plus gros fragmens entraînés avec le torrent volcanique sont arrêtés ; l’obstacle devient ainsi de plus en plus considérable, et le monticule, d’abord très petit, s’accroît rapidement. Dans une de ces rangées de collines, M. Junghuhn a observé que les sommets sont disposés très régulièrement sur une ligne inclinée de 2 degrés environ sur l’horizon. Ce fait démontre que, sous un angle très faible, les torrens boueux peuvent entraîner des blocs de rochers souvent assez considérables.

On trouve de pareilles collines autour de plusieurs volcans de Java, de l’Ajang, du Guntur et du Sumbing. Du cratère de ce dernier volcan sort une traînée de débris qui descend sur une longueur de 2 lieues et se termine par une myriade de monticules réguliers, pareils à de grandes taupinières de 10 à 12 mètres de hauteur. Les fragmens rejetés par ce volcan devaient être à une très haute