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Autant les discussions publiques s’animent et deviennent aisément ardentes en certains pays, autant elles se poursuivent avec calme à La Haye. La Hollande a eu pendant quelques années sa question brillante, une de ces questions qui mettent en jeu tous les instincts, les croyances, les passions d’un peuple. Il s’agissait d’organiser, de régulariser l’instruction primaire : en apparence, c’était une affaire plus administrative que politique ; au fond, la lutte était engagée entre les droits de l’état et les droits de la conscience individuelle, entre ceux qui voulaient libéraliser l’instruction et ceux qui cherchaient à faire prévaloir dans l’enseignement le caractère dogmatique, l’esprit de secte. La question a été résolue par des transactions, par des concessions mutuelles, et la situation s’est trouvée ainsi subitement dégagée. Le ministère lui-même, qui ne vivait que d’une vie incertaine, s’est suffisamment raffermi et n’a plus été réduit à disputer chaque jour son existence. La session législative qui a commencé il y a deux mois et qui est en ce moment suspendue pour quelque temps est l’expression la plus fidèle de cette situation. L’examen du budget a presque seul rempli cette session de deux mois. Toute discussion générale a même été écartée. Les chambres hollandaises se sont exclusivement renfermées dans des débats économiques et financiers ; elles ont élevé des plaintes contre les irrigations pratiquées en Belgique au détriment du niveau ordinaire de la Meuse et des grands canaux dans le Limbourg et le Brabant septentrional, ce qui compromet en certains instans la navigation et le commerce hollandais. Une négociation paraît s’être ouverte entre les gouvernemens, qui ont nommé une commission internationale chargée de trouver le moyen de concilier les intérêts des deux pays. On s’est également fort occupé de chemins de fer à La Haye. Tout le monde en Hollande est impatient de voir le sol national sillonné de plus en plus par ces grandes voies de communication ; il reste à savoir comment ces chemins de fer s’exécuteront. Le gouvernement proposait, il y a quelque temps, la construction de tout un réseau ; mais il hésitait encore sur le mode de concession. Rien n’a été décidé ; seulement les chambres ont adopté plusieurs motions qui tendent à presser le gouvernement de se mettre à l’œuvre, elles ont même voté des fonds pour subvenir à l’étude immédiate de quelques lignes principales dont l’exécution est la plus urgente. Enfin il est un projet qui n’a pas moins d’intérêt pour les Hollandais, c’est le percement des dunes de la Hollande septentrionale pour arriver à relier par un canal Amsterdam à la mer. Ce projet date de quelques années déjà, il y aurait évidemment un grand intérêt à le voir devenir une réalité ; le commerce d’Amsterdam, les états provinciaux demandent qu’il s’exécute. La seule objection sérieuse naissait de considérations stratégiques mises en avant par le département de la guerre, et cette objection elle-même disparaît dès que les chambres se montrent disposées à voter un crédit suffisant pour exécuter les travaux de défense militaire nécessités par l’entreprise nouvelle. La seconde chambre cependant n’a point voulu s’engager sans avoir un plan exact et pratique sous les yeux.

Dans son ensemble, telle qu’elle résulte de la discussion du budget, où ces questions ne sont intervenues que comme des épisodes, la situation financière de la Hollande reste assurément florissante. Les recettes de 1856 ont