Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 13.djvu/227

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ont également manqué, mais le fonds social de nos connaissances s’est accru par des récoltes satisfaisantes.

Il est de règle qu’il n’y a jamais plus de sept éclipses, et jamais moins de deux. Il y a toujours au moins deux éclipses de soleil, ce qui a fait qu’en 1857, où il n’y avait en tout que deux éclipses, il n’y a pas eu d’éclipse de lune. Aucune année ne peut donc être plus pauvre en ce genre de phénomènes célestes. Nous aurons en 1858 deux éclipses de soleil et deux éclipses de lune. L’éclipse de soleil du 15 mars 1858 sera pour Paris, et surtout pour l’Angleterre, une des plus belles de ce siècle. C’est au milieu du jour que cette grande éclipse aura lieu. Il ne restera pour Paris qu’un dixième de la surface du soleil non couverte par l’interposition de la lune, et les rayons solaires pénétrant par de petites ouvertures, au lieu de dessiner des ronds à l’ordinaire, traceront sur les objets qui les recevront des croissans semblables au croissant de la lune qui vient d’être nouvelle ; enfin les verres et les miroirs ardens ne produiront plus l’inflammation des matières combustibles. Le jour sera très affaibli, et comme à cette époque de l’année c’est la chaleur directe des rayons du soleil qui fait principalement la température du jour, il pourra se faire qu’on ressente pendant quelques minutes un froid très sensible qui du reste sera bien indiqué par le thermomètre, ainsi que je l’ai observé pendant l’éclipse de 1842. La première moitié de ce siècle a eu dix-huit éclipses de soleil visibles à Paris ; il y en aura en tout vingt et une dans la seconde moitié. Après l’éclipse de 1858, il y en aura deux autres assez belles en 1860 et 1861. Toutes seront utiles à l’astronomie physique, car, relativement à la constitution intime de l’astre central de notre monde, on a dit une grande vérité par ce mot bizarre : « Rien n’est si obscur que le soleil. »

L’année 1857 a continué de nous fournir des petites planètes du groupe nombreux qui est entre Mars et Jupiter. C’est pour ainsi dire la monnaie de la planète que Kepler indiquait comme devant manquer entre les deux planètes que je viens de nommer. L’année 1856 nous avait donné cinq de ces petits corps célestes ; nous en avons huit découverts en 1857, ce qui fait en tout cinquante. MM. Pogson, Goldschmidt, Luther et Ferguson se partagent ces conquêtes, mais fort inégalement, car M. Goldschmidt a pour son compte découvert quatre de ces planètes. Sur ces cinquante planètes, deux ont été trouvées en Amérique, à l’observatoire de Washington, par M. Ferguson. On voit combien nous sommes loin des sept planètes de l’antiquité, qui même n’arrivait à ce nombre qu’en mettant, contre toute analogie, le soleil et la lune au rang des planètes.

L’année qui vient de finir a été fort riche en comètes. On en a découvert six. La grande comète de Charles-Quint manque encore. C’est pour 1858 que les calculs astronomiques l’indiquent avec le plus de probabilité. Parmi les six comètes découvertes en 1857, il y en a une qui offre une importance majeure : c’est une réapparition de la comète périodique de Brorsen. Nous voilà donc en possession de cinq comètes dont l’orbite est connue. Ce sont les comètes de Halley, de Encke, de Biela, de Faye, de Brorsen. En général, il ne suffit pas que les calculs faits à une première apparition d’une comète indiquent son retour prochain, il faut au moins une réapparition pour être