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DE LA PRESSE
EN ANGLETERRE ET EN FRANCE

Histoire de la Presse en Angleterre et aux États-Unis, par M. Cucheval-Clarigny ; 1 vol. in-8o, Paris, 1857.



Ceux qui ont voyagé en voiturin dans certaines parties de l’Italie et qui, peu de temps après, ont parcouru les grandes voies ferrées du nord de l’Europe, ont gardé l’impression du plus vif et du plus intéressant contraste : — d’un côté, cette petite carriole mal assurée, à la marche inégale, incessamment cahotée condamnée à mille détours, tantôt par des précipices, tantôt par le voisinage de quelque bandit qui se tient à l’affût ; de l’autre, un immense convoi glissant à toute vapeur sur une ligne solide et brillante dont la loi et les mœurs écartent tout obstacle, emportant un peuple de voyageurs incessamment renouvelé, utile à tous, inviolable pour tous. C’est d’un contraste semblable que sera frappé tout esprit cultivé qui, déjà familier avec la presse de notre pays, voudra connaître celle de nos voisins.

Faut-il en conclure que le développement de la presse, comme le perfectionnement des voies de communication, est un signe assuré de la civilisation relative des peuples et peut servir à établir entre eux d’utiles comparaisons ? Il ne s’agit ici que de s’entendre. La presse n’est point le signe de la civilisation d’un peuple, si vous entendez seulement par ce mot de civilisation le développement de quelques parties élevées et délicates de la nature humaine, telles que l’art, la philosophie, la politesse, la hardiesse spirituelle de la pensée, l’élégance des mœurs. Sans être le moins du monde incompatibles avec la presse, ces perfections de la nature humaine cultivée ont brillé du plus vif éclat dans des sociétés dont la presse était