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voies nouvelles furent donc bien accueillis, et leur conduite fut habile. Ils prirent dès le début, vis-à-vis des mandarins, une position très élevée, que depuis il n’a pas été possible de leur faire perdre. Dès le début aussi, ils pénétrèrent dans les villes, firent des excursions aux environs, établissant ainsi leur droit et s’assurant de l’avenir. Ce n’est pas que les autorités du premier coup leur aient tout concédé, mais elles ne trouvèrent pas là, comme à Canton dans le siècle dernier, des hommes disposés à faire à leurs intérêts les plus lâches sacrifices; elles trouvèrent les agens d’un gouvernement fier et puissant appuyés sur le prestige dont la guerre venait d’environner la marine anglaise, et ce fut à elles de céder. Les consuls s’établirent donc facilement dans les nouveaux ports, et on se mit aussitôt en mesure d’y nouer des relations commerciales. Ces nouveaux ports étaient, comme nous l’avons dit, au nombre de quatre : Amoy, Foo-choo, Ning-po et Shanghaï. A Amoy, les résultats ne furent pas très brillans dans le principe. Cette ville devint le quartier-général de l’exportation des coolies ou travailleurs libres, sorte de traite des blancs, qui, bien conduite, peut donner de grands résultats; mais les abus et les horreurs dont elle fut accompagnée amenèrent de grands désordres. Toutefois, si ces désordres retardèrent le développement du commerce régulier, ils eurent le bon résultat d’unir les autorités des deux nations dans un effort commun contre la populace soulevée : excellent exemple et fort digne de remarque. D’autres abus vinrent enfin compliquer la situation; des navires et des négocians qui n’étaient pas anglais profitèrent de l’ouverture du port pour y commettre des actes répréhensibles contre lesquels on ne pouvait sévir, la Grande-Bretagne ayant seule envoyé des consuls, et ces consuls n’ayant autorité que sur leurs nationaux; mais le bon sens anglais finit par triompher de toutes ces difficultés.

A Foo-choo, le consul resta pendant plusieurs années tout seul, bien que sur une belle rivière, navigable jusqu’aux districts qui fournissent le thé. Des relations assez actives s’y sont nouées depuis.

Ning-po, grande ville sur son déclin, choisie à cause de sa situation au milieu des contrées où s’élève le ver à soie et où se fabriquent les soieries, n’a donné aucun résultat.

Mais Shanghaï, le dernier de ces ports vers le nord, est devenu le centre d’un trafic immense. Shanghaï, simple sous-préfecture chinoise de 300,000 âmes, est située sur le Woosung. Cette rivière, navigable aux plus grandes frégates, vient mêler ses eaux au Yang-tze-kiang, à son embouchure. Le Woosung communique en outre avec le Grand-Canal et tout le réseau de la navigation intérieure. On imaginerait difficilement une plus belle position commerciale : à égale distance, par mer, du sud et du nord de l’empire, à