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l’œuvre d’un jeune étudiant en théologie d’Andover, James Marsh, aujourd’hui docteur en théologie et président de l’université du Vermont, où il professe la philosophie. Esprit vigoureux et lucide, M. Marsh entreprit de réhabiliter le spiritualisme dans des articles qui remuèrent les universités et les séminaires. Il fut suivi bientôt dans cette voie par Orestes Brownson, qui se déclara ouvertement le disciple de M. Cousin et de l’école spiritualiste française; par le docteur Walker, professeur de philosophie à Harvard; par le révérend Théodore Parker, et par un métaphysicien original et profond, le révérend W. R. Greene. La défaite de la philosophie sensualiste fut complète, et l’honneur d’avoir porté le premier coup appartient à la Revue de l’Amérique du Nord. Cependant les spiritualistes victorieux n’ont pas tardé à être dépassés et compromis par les transcendentalistes, qui, sur les traces de Ralph Waldo Emerson, sont allés se perdre dans les nébuleuses régions du mysticisme. Ces exagérés n’ont pas eu d’adversaire plus habile et plus résolu que M. Francis Bowen, qui a pris, en 1842, la direction de la Revue de l’Amérique du Nord. M. Bowen, dont toutes les études ont porté sur la métaphysique et sur la philosophie du droit, est un esprit net et pénétrant, un logicien vigoureux et un écrivain plein de nerf. Il a fait une guerre acharnée au transcendentalisme, qu’il définit un mélange de prétentions, de sentimentalité et de déraison, et sa polémique contre Emerson et son école est ce que la philosophie a produit de plus solide aux États-Unis.

La Revue de l’Amérique du Nord est le seul recueil trimestriel qui ait parcouru une longue carrière; on ne trouve à mentionner à côté d’elle que des publications éphémères ou de fondation toute récente. La Revue Américaine, établie en 1827 à Philadelphie par M. Robert Walsh et rédigée dix années par lui avec un grand succès, disparut en 1837, lorsque son fondateur quitta les États-Unis pour l’Europe. L’existence de la Revue trimestrielle du Sud a été plus courte encore. Ce recueil avait dû pourtant un grand éclat à la collaboration de quelques hommes de talent tels que Hugh Legaré, Stephen Elliott et W. G. Simms. Legaré, né à Charleston en 1792 et tué par accident en 1843, lorsqu’il était ministre de la guerre sous la présidence de M. Tyler, était d’origine française. Il vint en 1818 à Paris pour étudier la philosophie et le droit, et il passa ensuite quelque temps à l’université d’Edimbourg. A son retour aux États-Unis, il débuta dans le barreau à Charleston et se plaça immédiatement au premier rang des avocats et des hommes politiques de la Caroline du sud. Lorsque la Revue trimestrielle du Sud fut créée en 1827 à Charleston pour défendre les intérêts et les opinions des états du sud en matière de politique et de finances, Legaré en devint le principal collaborateur,