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être indifférens aux deux autres nations nées du même sang, deviennent précisément la pierre de touche du scandinavisme. Qu’il soit, comme il le prétend, capable de les conjurer, ou bien qu’il vienne s’y ajouter, ainsi que l’affirment ses adversaires, comme un nouveau péril, dans l’un et l’autre cas il prend une importance vraiment politique, et la seconde période de son histoire, dont nous n’avons vu encore que la préparation, est véritablement commencée.


III.

Sans vouloir reprendre tout au long l’histoire du Danemark pendant les dix dernières années, histoire difficile à saisir et difficile à exposer, il faut que nous insistions sur les récentes complications qui ont amené le péril où s’agite aujourd’hui ce petit royaume constitutionnel. D’abord c’est le cœur même de notre sujet, car nous toucherons ainsi du doigt la raison fondamentale et l’explication de l’importance qu’a prise en ces derniers temps le mouvement scandinave et des espérances qu’il a fait naître. Et puis on en conclura sans peine de quelle considération peuvent jouir actuellement, auprès de quelques-unes des grandes puissances de l’Europe, certaines doctrines d’équilibre européen et de droit politique; on aura, comme on dit en Allemagne, quelques-uns des signes du temps.

Le Danemark a vu plusieurs fois depuis dix ans et voit encore en ce moment mettre en question à la fois le triple intérêt de son intégrité territoriale, de ses libertés constitutionnelles et de son indépendance extérieure, c’est-à-dire finalement de son existence même comme nation. De plus, il est permis de croire que, dans la crise suprême qu’il subit, certaines puissances ses voisines ont engagé des espérances tenues dès longtemps en réserve. Dès 1848, l’incertitude de la succession royale d’une part, le bizarre et funeste amalgame de la monarchie danoise de l’autre, furent les sources des premières complications. On pouvait prévoir que la branche d’Oldenbourg allait s’éteindre. L’héritier le plus prochain et le plus direct devant être choisi, suivant la loi royale de 1665, dans la branche féminine de cette même famille, un parti anti-danois, qui couvait depuis longtemps en Holstein, éleva la double prétention que certaines parties de ce duché, soumises à un droit de succession particulier n’admettant pas l’hérédité suprême dans la descendance féminine, devraient se séparer du Danemark, si ce royaume tombait en quenouille, et que le Slesvig, aux termes de certaines déclarations des anciens rois, devrait rester en tout cas inséparablement uni au Holstein. Nous avons dix fois réfuté cette double et injuste réclamation, sous laquelle se cachait l’ambition du slesvig-holsteinisme. Pendant que la question de