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de cette revue, c’est presque faire l’histoire de la littérature aux États-Unis. Elle a eu pour fondateur un des membres de l’ancien club de l’Anthologie, William Tudor, qui en commença la publication avec ses ressources personnelles. Au bout de deux ans, il céda son droit de propriété à Willard Phillips, ou plutôt au club de l’Anthologie, reconstitué sous le nom de club de l’Amérique du Nord, et dont les membres les plus actifs étaient Edouard E. Channing, Richard H. Dana et Jared Sparks, l’historien de Washington, alors répétiteur à l’université d’Harvard. A la fin de 1819, M. Edward Everett, qui voyageait en Europe, fut élu professeur de littérature grecque à Harvard, et revint en Amérique après quatre ans d’absence. La rédaction en chef de la Revue de l’Amérique du Nord lui fut aussitôt confiée. M. Edward Everett, qui depuis la mort de Daniel Webster est le premier orateur des États-Unis, qui a été tour à tour secrétaire d’état et ambassadeur à Londres, jouit d’une réputation plus grande encore comme écrivain que comme homme politique. Profondément versé dans la connaissance des littératures anciennes, il possède en outre la plupart des langues de l’Europe. C’est un écrivain ingénieux et disert, dont le style abondant et flexible convient merveilleusement à la critique littéraire, et un savoir étendu lui fournit une mine inépuisable de rapprochemens heureux et d’instructives comparaisons. C’est sous sa direction que la Revue de l’Amérique du Nord a jeté le plus d’éclat. Dans le cours de quatre années, il écrivit pour elle près de cinquante articles, c’est-à-dire à peu près la moitié du recueil. Plusieurs de ces articles, notamment ceux sur la Grèce moderne, que M. Everett venait de visiter, et sur la littérature anglaise contemporaine, eurent l’honneur d’être reproduits et commentés en Angleterre. Aux États-Unis, la vogue fut très grande : il fallut réimprimer jusqu’à trois fois certains numéros. Ce succès attira sur M. Everett l’attention publique, et à la fin de 1823 il fut élu membre du congrès pour le Massachusetts; il avait alors vingt-neuf ans. Il résigna la rédaction en chef du recueil entre les mains de Jared Sparks, mais il en demeura encore pendant près de dix ans un des collaborateurs les plus assidus. On évalue à près de soixante le nombre des articles qu’il y a publiés pendant cette période, et qui sont le fruit des heures qu’il a pu dérober à une vie politique des mieux remplies. M. Jared Sparks dirigea la Revue de l’Amérique du Nord jusqu’à la fin de l’année 1829 : il abandonna alors la rédaction en chef pour se consacrer à ses travaux historiques, et pour commencer la publication en douze volumes de la Correspondance diplomatique de la révolution américaine, suivie bientôt de la Vie de Washington. Depuis l’achèvement de ces grands travaux, c’est-à-dire depuis 1839, M. Sparks est professeur d’histoire