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réduit à faire remarquer que le réseau bénéficiera de presque toute la circulation existante, circulation considérable, on s’en souvient, si l’expérience du chemin de Pétersbourg à Moscou ne nous autorisait à présenter une appréciation moins vague.

En 1855, le rendement brut de la ligne de Pétersbourg à Moscou, pour le transport des voyageurs et des marchandises, a été de 20,957,296 francs, soit par kilomètre 32,542 francs; l’année dernière, il a été de 30,013,032 francs, soit par kilomètre 46,604 francs. Les tarifs du réseau ne seront pas moins favorables. Il n’y a donc rien de hasardé à avancer que ses 4,162 kilomètres, à 45,500 francs par kilomètre, donneront une recette brute de 189,371,000 francs. Si l’on porte les frais d’exploitation à 50 pour 100, le revenu net sera de 94,685,500 francs, ce qui représente plus de 8 1/2 pour 100 sur un capital de 1,100 millions. Peut-être est-il assez naturel de craindre, dans une opération lointaine, un surcroît de dépenses qui diminuerait le revenu présumé, qui altérerait même le taux de la garantie. Si cela arrivait, la concession du minimum d’intérêt à 5 pour 100, de la jouissance du réseau durant quatre-vingt-cinq ans, et des autres faveurs accordées par le gouvernement russe, n’aurait été qu’un leurre. Pourtant un territoire faiblement accidenté ne comporte pas des tours de force dispendieux. Le peu de relief du sol sur plusieurs parties du tracé offrira même des facilités exceptionnelles. La main-d’œuvre est à meilleur marché qu’ailleurs, les bois sont à bon compte. Quant au matériel, rails, locomotives, machines, etc., la compagnie n’aura garde de les demander aux établissemens de la métallurgie russe, qui sont reculés dans les terres et travaillent à des prix surélevés; elle s’adressera aux usines de la Belgique, de l’Allemagne, de l’Angleterre, de la France, et l’on notera en passant que l’industrie occidentale retiendra toute la portion du capital destinée à en solder la fourniture, 300 millions peut-être, circonstance atténuante de l’expatriation des capitaux européens. Il va de soi que l’entrée en Russie est franche de tous droits de douane. Puisque la dépense ne doit être grossie par aucun incident particulier, il suffit donc qu’elle ait été fixée à une limite qui laisse de la marge. D’après le capital admis, le kilomètre reviendra à 273,000 francs pour une seule voie, les terrassemens et les ouvrages d’art devant être établis pour deux voies. Or, en France, le kilomètre de chemin de fer, dans les mêmes conditions, revient à 228,000 fr., sur lesquels plus de 30,000 francs sont imputables à l’acquisition des terrains. Ce sont des chiffres officiels. En Russie, le maximum des indemnités de cette nature ne saurait dépasser 2,000 francs, soit à cause du bon marché des terrains particuliers, soit à cause de l’abandon gratuit des terrains de la couronne, dont les lignes pro-