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accroître de 33 à 50 pour 100 la production totale. On se fera une idée de la puissance déjà acquise à cet ensemble d’usines réunies sous une seule direction, si nous ajoutons qu’elles exploitent les produits de la culture d’environ 1,400 hectares, et qu’elles ont pu fournir, en dehors de leurs débouchés habituels, aux armées alliées, depuis l’origine jusqu’à la fin de la guerre de Crimée, 6 millions de kilog. provenant de 50 millons de kilog. de matière première épluchée, formant en totalité 300 millions de rations alimentaires.

En présence d’un pareil succès, nous formons des vœux bien sincères pour que la nouvelle industrie fondée près de l’embouchure du Dnieper, avec une colonie d’ouvriers français, et sous la protection éclairée du gouvernement russe, prenne un développement non moins rapide et non moins fructueux dans l’intérêt des deux nations. Ce serait encore un des résultats heureux de la paix, et qui serait obtenu sur le théâtre même d’une guerre formidable et glorieuse pour tous les peuples qui s’y sont mesurés.


PAYEN.


SECONDE EXPEDITION A LA RECHERCHE DE SIR JOHN FRANKLIN, par E. K. Kane[1]. — Pendant l’année 1850, alors qu’une véritable escadre anglaise parcourait en tous sens les parages lointains où sir John Franklin était perdu ou avait péri, un négociant de New-York, M. Grinnell, eut la généreuse pensée d’envoyer un navire dans les mers arctiques pour participer à ces travaux de recherche. Le docteur Kane, attaché à l’expédition américaine, publia à son retour un émouvant récit de cette première campagne, et annonça en même temps le désir d’en recommencer une nouvelle. La libéralité de M. Grinnell et des sociétés savantes des États-Unis lui permit de repartir, dès le mois de décembre 1852, pour ces régions désolées, où l’attirait, avec l’espoir déjà bien affaibli de trouver quelques traces de sir John Franklin et de ses compagnons, l’ambition d’étendre les découvertes géographiques des marins anglais et de pénétrer jusqu’à la mer, libre de glaces, dont le pôle boréal est supposé le centre. Cette espérance a été en grande partie trompée : le docteur Kane ne parvint point à sortir du détroit de Smith, qui longe la côte occidentale du Groenland, et que le capitaine Inglefield avait peu de temps auparavant visité. Le commandant américain choisit pour lieu d’hivernage, sous le 78e degré de latitude environ, une baie profonde creusée dans les côtes dentelées du Groenland : excepté au Spitzberg, qui jouit d’un climat insulaire tempéré par des courans marins, aucun navigateur n’avait encore hiverné à une si haute latitude. Pendant cent quarante jours, le soleil resta sous l’horizon, et l’on enregistra des températures qui descendirent jusqu’à 56 degrés au-dessous de zéro dans le petit observatoire établi sur un rocher près du navire, où l’on continua, même pendant les froids les plus cruels de la longue nuit arctique, une suite non interrompue d’observations magnétiques, astronomiques et météorologiques. En partant du point où il était arrivé avec son navire, le docteur Kane avait compté faire de longues expéditions en traîneau ; il avait emmené avec lui neuf magnifiques chiens de Terre-Neuve et trente-quatre chiens esquimaux qu’il eut beaucoup de peine à dresser ; mais l’extrême rigueur de l’hiver les fit presque tous périr, et il ne lui en restait plus que six au moment où la saison permit de commencer

  1. 2 volumes in-8o, Philadelphie, Childs et Peterson, — Londres, Trübner et Co.