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prix d’achat fixé en moyenne à 10 cent. par kilogramme, les frais de préparation et le prix des enveloppes en fer-blanc à 30 cent., les transports à Paris par Marseille à 16 cent., l’octroi de Paris et la commission de vente à 30 cent. ; le prix coûtant total serait donc de 86 cent., et le prix de vente avec bénéfice de 1 fr : À ce taux, l’avantage pour le consommateur paraît évident, car il recevrait pour 1 fr. un kilog. de viande toute préparée, représentant 1 kilog. 250 gr., en raison de la diminution d’un cinquième du poids par la cuisson, c’est-à-dire à un prix à peu près moitié moindre que celui du cours actuel.

La nouvelle industrie internationale aura d’ailleurs d’autres conséquences utiles, car elle fournira, outre les peaux, les toisons et le suif déjà importés, des matières premières insuffisantes dans plusieurs de nos industries : notamment les os pour la tabletterie et la fabrication du charbon d’os employé à l’extraction et au raffinage du sucre ; le sang, qui fournit par la dessiccation du sérum, de l’albumine propre aux impressions sur étoffes, et un engrais transportable à de grandes distances, en raison de sa valeur vénale ; les intestins propres à la préparation de la baudruche et des cordes harmoniques pour les instrumens ; la substance cornée, employée dans la préparation du bleu de Prusse ; les tendons, qui servent à fabriquer la gélatine.

La nouvelle source de produits alimentaires tirés des animaux trouvera sans doute un facile écoulement par les voies déjà largement ouvertes à la production remarquable des légumes desséchés, et ajoutera de cette manière un utile complément à l’industrie, établie sur une base solide, qui exploite les matières premières extraites des végétaux. Cette dernière industrie, que nous avons déjà fait connaître, a pris un plus grand essor et réalisé en même temps de nouveaux progrès et de nouvelles économies par l’établissement de sècheries spéciales en différentes régions agricoles plus particulièrement adonnées à certaines cultures. C’est ainsi que l’usine fondée à La Villette est consacrée à la préparation des choux obtenus de la principale culture locale ; l’usine de Rueil s’applique au traitement des pommes de terre, divisées en petits prismes immergés un instant dans l’eau froide, puis desséchés ; l’usine de Meaux trouve dans de bonnes conditions économiques les carottes, qu’elle réduit en tranches minces et dessèche, tandis que la manufacture primitive fondée aux Champs-Elysées, dans Paris, continue à préparer les divers légumes fins aux époques où les marchés sont abondamment pourvus. En même temps qu’elle centralise les produits des trois autres fabriques, elle les soumet à une énergique pression, afin d’en former des tablettes, après les avoir assortis ou réunis en des mélanges conformes aux demandes des administrations publiques et aux habitudes des consommateurs soit de la capitale, soit des départemens. Une cinquième usine est actuellement instituée à Dunkerque : on y prépare exclusivement des choux découpés et soumis à la fermentation acide. Les cinq manufactures disposent d’un matériel considérable, représentant ensemble une force de 169 chevaux, 140 étuves[1] et 10,080 châssis, sans y comprendre les ustensiles de trois féculeries annexes qui, en cas de commandes extraordinaires, peuvent

  1. Chaque étuve en vingt-quatre heures dessèche environ 1,000 kilog. de légumes épluchés, qui donnent de 80 à 100 kilog. desséchés.