Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 8.djvu/958

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Voici comment on parvient à réunir ces conditions favorables. Aussitôt après l’abattage des animaux, les muscles, débarrassés des portions tendineuses ou membraneuses de moindre valeur alimentaire ou plus altérables, sont soumis à une coction légère qui en réduit un peu le volume ; on les dispose ensuite « n morceaux volumineux dans des vases cylindriques en fer-blanc, que l’on remplit autant que possible, et qui contiennent 6 kilogrammes de substance comestible. Ces vases sont clos hermétiquement par les moyens usuels, à l’aide de soudures à l’étain. On les place alors dans une chaudière dite autoclave, où ils sont chauffés au bain-marie d’eau, soit à feu nu, soit par la vapeur, de telle façon que leur température s’élève jusqu’à 108 ou 110 degrés, pendant une heure et demie environ. La préparation est dès lors terminée ; on peut emballer et expédier les ; boîtes ; remplies et chauffées de cette manière. Arrivées au lieu de leur destination, elles peuvent être livrées intactes aux établissemens et aux particuliers dont la consommation journalière atteint ou dépasse la quantité de 6 kilos contenue dans chacune des boites. Quant aux consommateurs isolés qui, dans un repas ou même durant une journée, se contentent d’une ration vingt-quatre fois moindre, c’est-à-dire de 250 grammes, la distribution régulière se fera sans la moindre difficulté, grâce à l’ingénieux ustensile imaginé par M. Cholet. Sur un bâti formé d’une planche épaisse et de deux tasseaux : semi-circulaires, on place horizontalement un des vases dont on a préalablement enlevé les deux fonds. Le cylindre est solidement assujetti avec une bande épaisse et large de 15 ou 18 centimètres, en caoutchouc vulcanisé, que l’on tend et que l’on fixe à l’aide de boutons ou d’agrafes. Une vis suivant l’axe horizontal du cylindre passe dans un écrou adapté à l’un des bouts du bâti : en la faisant tourner, on pousse la volonté un disque qui, agissant comme un piston, fait sortira l’autre bout et sous forme sensiblement cylindrique la substance contenue et refoulée dans la boîte. On peut donc couper très facilement, à l’aide d’un large couteau, toute la partie qui dépasse les bords du vase et obtenir une tranche dont l’épaisseur et par suite le poids se trouvent réglés d’après une échelle graduée suri lai tige. On comprend que cet ustensile, d’une construction simple, permette de distribuer rapidement les portions demandées par l’acheteur en fractions aussi faibles ou aussi fortes qu’il le désire, et dont les dimensions se trouvent, réglées directement sous ses yeux, qu’enfin la valeur du vase dans lequel on a conservé et transporté la substance alimentaire soit répartie uniformément sur toutes les portions, et, comme leur prix, exactement proportionnel à leur poids.

M. Cholet, en administrateur éclairé, se préoccupant des moyens d’assurer à son entreprise nouvelle la sympathie de quelques hommes influens des deux pays, a voulu former à cette occasion une association internationale franco-russe d’alimentation. Une usine pour la préparation des viandes qu’il s’agirait de transporter de Russie en France serait construite près de l’embouchure du Dnieper, dans la Mer-Noire. Comptant sur le bienveillant appui du grand-duc Constantin pour aplanir toutes les difficultés locales, le manufacturier français a pu établir, par le calcul suivant, le prix de revient des produits importés en France, et vendus dans Paris. La matière, première, en très grande partie perdue jusqu’ici, ne coûtera guère que les frais du dépeçage des animaux et du transport à l’usine. On a supputé toutefois un