Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 8.djvu/889

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de fer s’arrête à Albacète, ville de 25,000 habitans seulement, traverse la partie la moins populeuse de tout le tracé, et n’aboutit à aucun centre considérable de commerce : que sera-ce lorsqu’il desservira les riches royaumes de Murcie et de Valence, lorsque surtout il touchera à la Méditerranée ? Le résultat obtenu après quelques mois d’exercice, avec un matériel nul, dans un pays neuf encore aux habitudes commerciales, dépourvu de ces communications latérales qui sont pour un chemin de fer ce que les affluens sont à un fleuve, permet d’espérer à court terme un produit double au moins du produit actuel. Il faut enfin remarquer que le chemin de fer d’Alicante, par cela même qu’il sera le premier ouvert, jouira tout d’abord de l’avantage d’approvisionner seul la capitale, et monopolisera à son profit la plus grande partie du commerce des ports de la Méditerranée, qui entrent pour 70 pour 100 dans le commerce général, et le produit entier des échanges avec le centre de l’Espagne.

On ne peut s’empêcher de reconnaître que le chemin de Saragosse à Madrid est beaucoup moins favorisé par rapport à la population des pays qu’il parcourt. Quoiqu’il doive traverser un pays très riche en céréales, ses meilleures chances d’avenir reposent sur sa jonction avec Barcelone, Pampelune ou la France ; mais, par suite du traité à forfait conclu avec la société mercantile de Madrid, le prix kilométrique de construction ne doit pas dépasser 150,000 fr. Il est assurément facile d’obtenir un revenu rémunérateur à ces conditions. On a élevé des doutes sur la possibilité de construire le chemin de Saragosse au prix de 150,000 francs le kilomètre. Peu importe à la compagnie elle-même, qui a traité avec la société Weiswiller, dont la solvabilité n’est pas douteuse.

Quant au chemin de fer du Nord, il suffira de jeter les yeux sur une carte de la Péninsule pour en apprécier l’importance. Il se compose de trois parties concédées à différentes époques à la société générale de crédit mobilier espagnol. La première va de Madrid à Valladolid, la deuxième de Valladolid à Burgos, la troisième de Burgos à Vittoria et Irun. C’est dans la première section que s’embranche la ligne de Dueñas à Alar del Rey, tête du chemin de Madrid à Santander. Aucune fraction de ce grand réseau n’est encore prête pour l’exploitation, mais la compagnie concessionnaire se propose de donner à ses travaux une direction dont on comprendra la portée. Il s’agira d’abord d’ouvrir la section de Madrid à l’Escurial, c’est-à-dire d’assurer un service de banlieue d’autant plus profitable que cette partie des environs de Madrid est la seule boisée, la seule qui offre un abri contre les chaleurs de l’été, la seule qui fournisse enfin les matériaux de construction nécessaires à une grande capitale. D’autre part et à l’extrémité de la ligne, on attaquerait de préférence la section de Saint-Sébastien à Tolosa, c’est-à-dire