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à Rome par exemple, est une cause de perfectionnement, un principe de beauté, est en Égypte une cause de décadence, un principe de laideur. La statuaire égyptienne et la sculpture hiéroglyphique du temps des Ptolémées se reconnaissent tout d’abord à leur infériorité, quand on les compare à ce qu’elles étaient sous les pharaons. Je ne reviendrai pas sur les causes de cette anomalie. J’ai eu l’occasion de les indiquer en passant dans une autre partie de ces études ; mais on peut constater le fait sans sortir de Rome, en allant regarder successivement les admirables hiéroglyphes de l’obélisque de Thoutmosis III qui décore la place de Saint-Jean-de-Latran, et ceux qui datent du temps des Ptolémées, au Musée-Grégorien.

Quand l’Égypte fut devenue province romaine, les Romains se trouvèrent en contact avec elle, et la sculpture qu’ils avaient reçue des Grecs fut appliquée au bout d’un certain temps, et surtout sous Adrien, à reproduire à sa manière les types égyptiens. J’en ai déjà dit un mot à propos d’une statue d’Antinoüs : j’y reviendrai tout à l’heure ; mais il faut auparavant indiquer quelles avaient été avant cette époque les importations de l’art égyptien à Rome et ses influences.

D’abord l’Égypte put influer indirectement sur les Romains par l’intermédiaire des Étrusques. Les Étrusques, les premiers maîtres des Romains, étaient entrés avant eux en relation avec l’Égypte. Pour la retrouver presque à chaque pas, il suffit de parcourir le musée étrusque du Vatican. La fleur de lotus y reparaît sans cesse dans les ornemens des vases en terre et en bronze. La porte du tombeau étrusque dont on a eu l’heureuse idée de placer dans ce musée un fac simile exact est une porte égyptienne aussi bien que les portes des tombes qui existent dans plusieurs parties de l’ancienne Étrurie. Toujours dans le même musée, les peintures copiées des sépulcres de Tarquinii offrent une scène funèbre parfaitement semblable à celles qui sont représentées dans l’intérieur des tombes égyptiennes. Parmi les ornemens sacerdotaux trouvés dans un tombeau étrusque à Cervetri, et qu’on admire dans la vitrine centrale du Musée-Grégorien, on reconnaît des figures dont la ressemblance avec certaines figures symboliques égyptiennes est trop grande pour être fortuite, entre autres des femmes avec de grandes ailes éployées qui descendent jusqu’à leurs pieds. Enfin des scarabées, sur lesquels se lisent de véritables hiéroglyphes, achèvent de prouver les communications de l’Étrurie et de l’Égypte, comme les vases, les portes, les peintures sépulcrales, les bijoux étrusques rendent indubitable l’action de l’art égyptien sur l’art étrusque.

Outre ce qui a pu venir de l’Égypte aux Romains par cette voie indirecte, eux-mêmes ont conquis et gouverné ce pays après les Grecs.