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plète, d’entrer dans des considérations aussi longues qu’arides ; mais il m’est heureusement facile d’en faire connaître la forme apparente, et cela suffira pour l’emploi que l’on en peut faire. On se sert tous les jours de lunettes sans les comprendre, on peut bien aussi utiliser un photomètre sans savoir les principes sur lesquels il est fondé. On peut dès-lors se figurer une lunette assez semblable à une lorgnette de spectacle ; en mettant l’œil au bout antérieur, on voit qu’elle est intérieurement séparée en deux par une cloison. À travers un des compartimens, on regarde un objet ; par l’autre on voit l’objet voisin, et, en la tournant convenablement sur elle-même, on peut diriger la cloison vers la ligne de séparation de ces deux objets. Tout près de l’œil, il y a sur l’instrument un cercle qui l’enveloppe comme un anneau, et que l’on peut faire tourner comme une roue sur son essieu. Telle est la forme extérieure de l’instrument ; quant aux verres ou aux cristaux qu’il renferme, je les passe sous silence, désespérant d’en pouvoir décrire les propriétés. Voici maintenant le jeu singulier de l’appareil. Je regarde par son intermédiaire une feuille de papier blanc également éclairée, j’en vois une partie à travers le premier compartiment et une autre à travers le second, puis je fais tourner l’anneau, et je remarque que l’une des parties s’éclaire peu à peu, tandis que l’autre s’obscurcit progressivement. La feuille de papier semble gagner de l’éclat d’un côté et en perdre de l’autre, absolument comme si une lumière d’une part et une ombre de l’autre se projetaient sur elle. Ce qu’il y a de remarquable, c’est que tous les détails continuent d’être visibles ; s’il y a des caractères tracés sur sa surface, ils restent distincts. Enfin, en faisant tourner le cercle de plus en plus, l’action s’exagère, et le compartiment le plus sombre devient entièrement noir, pendant que l’autre atteint son plus grand éclat. À cet appareil est adaptée une graduation calculée d’avance : elle porte des chiffres gravés qui indiquent la proportion de lumière qui est éteinte dans chaque partie de l’appareil pour une situation quelconque de l’anneau tournant.

Cela posé, je vais par un exemple faire comprendre l’utilité de cet appareil pour un physicien. Je me place devant une muraille uniforme, je la suppose peinte avec une couleur quelconque, jaune, si l’on veut, et je l’examine au moment où l’ombre d’une maison voisine, se projetant sur elle, la divise en deux parties dont l’une est éclairée et l’autre ombrée. Il est évident qu’il n’y a pas de différence dans la couleur des divers points, qu’il n’y en a que dans leur éclat, et si je venais à éteindre progressivement la lumière des portions éclairées, j’arriverais à leur donner la même apparence qu’aux portions ombrées. Je dirige alors ma lunette sur cette maison ; je regarde la lumière à travers un des compartimens et l’ombre à travers