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et il fallut le remplacer par des subdivisions plus nombreuses. Un nouveau décret, rendu le 11 mars, divisa la grande armée en onze corps, mais prolongea pendant quelque temps encore sa subdivision en deux masses principales, armée de l’Elbe et armée du Mein. Dans les premiers jours d’avril, l’armée du Mein était réunie presque tout entière. Les soldats dont elle était composée avaient été tirés de toutes les parties de l’empire, et les mesures avaient été si bien calculées, que, quelles qu’eussent été les distances à parcourir, la plupart de ces hommes rassemblés provisoirement en bataillons de marche, mais avec leur numéro d’ordre, étaient arrivés ponctuellement à l’époque et sur les points désignés.

Du 10 au 15 avril, l’armée du Mein commença à s’ébranler et s’avança sur la Saale. En tête, et par la grande route de Wurtzbourg, marchait le 3e corps, précédemment le premier corps d’observation du Rhin ; il était commandé par le maréchal Ney et constituait à lui seul une armée tout entière. Il ne comptait pas moins de 61,000 hommes, répartis en cinq divisions, et 92 pièces de canon, dont 15 de gros calibre. Le 6e corps (deuxième corps d’observation du Rhin), conduit par le duc de Raguse, suivait en seconde ligne et venait de Hanau. Sa force numérique était de 45,000 combattans : il formait, avec la garde et le 11e corps, l’élite de l’armée. C’est dans ses rangs que l’empereur avait versé les canonniers de la marine, tous vieux soldats ; il en avait composé deux divisions sous les ordres des généraux Compans et Bonnet. Le 4e corps (corps d’observation d’Italie), commandé par le général Bertrand, était de 40,000 hommes. L’empereur en détacha deux divisions, celles des généraux Pacthod et Laurencez, auxquelles il réunit la division bavaroise du général Raglovitch, et en forma un nouveau corps, le 12e, qu’il mit sous les ordres du maréchal Oudinot. La garde impériale, commandée par le duc d’Istrie, comptait également 40,000 hommes, et, vu l’urgence des circonstances, l’empereur l’avait fait transporter en poste.

Le total des forces avec lesquelles Napoléon allait ouvrir la campagne s’élevait donc, en y comprenant les 35,000 hommes du général Vandamme, à 275,000 hommes ; mais ce chiffre était l’effectif sur le papier : l’effectif réel, déduction faite des non-valeurs, des malades et des traînards, ne dépassait pas 210,000 hommes, dont 9,000 seulement de cavalerie.

Assurément cette armée était bien jeune : elle n’avait point l’expérience de la guerre, et pourtant, prise dans son ensemble, elle était digne de se mesurer avec les vieux soldats de la Russie et de la Prusse. C’est que Napoléon avait mis un art infini à la composer : il y avait introduit tout ce qui restait en France de vieux soldats, une partie notable de ceux qui combattaient en Espagne, et enfin