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de Wittgenstein, et remplissaient d’agitation et de trouble tout le pays arrosé par le Weser et l’Ems.

Ainsi notre situation militaire s’aggravait de jour en jour. L’ennemi, maître de Dresde et de Hambourg, débordait nos deux ailes, et menaçait à la fois la Franconie, la Westphalie et toutes nos lignes de communication entre le Rhin et l’Elbe. Le vice-roi jugea que le moment était venu d’arrêter ces progrès en frappant un coup de vigueur. Il prit avec lui les corps de Lauriston et du duc de Bellune, les divisions Fressinet et Charpentier, toute sa cavalerie, presque tous ses canons, déboucha hardiment de Magdebourg, et manœuvra comme s’il avait l’intention de se porter sur Berlin. Les Prussiens, commandés par Bulow, étaient en position et en forces à Mockern. Le 5 avril, le prince les aborda résolument sur trois colonnes, et leur livra un rude et sanglant combat dans lequel il leur tua et blessa plusieurs milliers d’hommes, et fit lui-même des pertes sensibles, celle entre autres de 422 hommes de cavalerie sur quatorze régimens engagés. Bulow alarmé informa aussitôt Wittgenstein qu’il avait sur les bras toutes les forces du vice-roi, et qu’il n’y avait aucun doute que ce prince ne marchât sur Berlin. Le généralissime russe ne crut pas devoir suspendre son mouvement sur l’Elbe, et, du 6 au 8, il passa le fleuve à Dessau avec le corps de Voronzof et les Prussiens du général York. De son côté, Blücher, avec 25,000 hommes, se porta le 8 de Dresde sur Altenbourg, et Miloradovitch sur Chemnitz, dans l’intention l’un et l’autre de se réunir à Wittgenstein. La démonstration offensive du vice-roi n’en eut pas moins les conséquences les plus heureuses pour nous ; elle répandit dans l’esprit des généraux alliés beaucoup d’hésitation, et déconcerta leurs mouvemens : ils n’osèrent s’aventurer loin du bassin de l’Elbe, laissèrent échapper l’occasion, qu’ils ne retrouvèrent plus, de manœuvrer entre l’armée de l’Elbe et l’armée du Mein, et l’empereur eut le temps d’arriver.

Lorsque le vice-roi apprit que Wittgenstein avait passé l’Elbe à Dessau, il le repassa à son tour et se porta avec toutes ses forces sur Strasfurth, au confluent de ce fleuve et de la Saale. Bientôt les deux armées se trouvèrent en présence, séparées seulement par les eaux de la Saale. Wittgenstein et York remontèrent la rive droite de cette petite rivière, jetèrent 7,000 hommes dans les murs de Halle, 2,000 dans Mersebourg, et envoyèrent des partisans dans toute la Thuringe.

Le 6 janvier, l’empereur avait décrété la création de quatre grands corps d’observation, un de l’Elbe, deux du Rhin, un d’Italie, et porté leur force numérique à l’effectif de 292 bataillons. La formation de ces quatre corps était une organisation provisoire appropriée aux exigences du moment. Bientôt ce mécanisme simplifié se trouva insuffisant,