Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 7.djvu/299

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

soient les merveilleux avantages de son ciel et de son sol, n’aurait jamais été visitée par le génie de la civilisation, que son malheureux état n’étonnerait, après tout, que les statisticiens et les géographes ; mais les choses, comme on sait, sont bien loin de s’être passées ainsi. Deux fois l’Italie a été le siège des plus grands empires que l’histoire ait jamais vus : l’empire romain, qui, durant sept siècles, réduisit à l’unité d’une obéissance commune le monde presque entier, et l’église, qui, aujourd’hui encore, après tant d’orages, ou gouverne ou domine la conscience religieuse du cinquième au moins du genre humain. Et c’est cette même contrée, deux fois la capitale de l’univers, qui ne peut parvenir à ne former qu’un seul état ! Si l’on considère ensuite la position que la péninsule occupe sur la carte du globe, on ne sera que plus surpris encore du peu de parti que ses habitans actuels en tirent. Il est bien vrai que le bassin de la Méditerranée n’est plus ce qu’il était au moyen âge, au temps de la splendeur d’Amalfi, de Venise, de Florence et de Gênes : la découverte de l’Amérique et ensuite l’émancipation des États-Unis ont créé dans l’Océan une voie de communication nouvelle infiniment plus étendue et plus riche. Que de ressources encore pourtant offrirait à un peuple qui saurait l’exploiter la possession de la côte unique qui s’étend du golfe de Gênes au détroit de Messine ! Est-ce donc que la race d’hommes qui habite cette contrée soit une race inférieure à celles qui peuplent le reste de l’Europe ? C’est peut-être la mieux douée de toutes. Depuis la renaissance de la civilisation au XIIIe siècle, renaissance dont ce peuple a encore l’honneur d’avoir donné le signal, il n’est pas d’âge où il n’ait produit dans tous les genres quelqu’un de ces hommes extraordinaires qui demeurent pour l’histoire les types les plus accomplis de notre espèce. Est-ce d’ailleurs que, pris en moyenne, l’Italien soit un homme médiocre ? Loin de là ; il est propre à tout : matelot, soldat, marchand, administrateur, savant, lettré, artiste, homme d’état, il a en lui la ressource de toutes choses. Enfin considérez la péninsule dans la condition même où elle est aujourd’hui ; vous y trouverez deux états qui, ce semble, devraient aisément l’un ou l’autre servir de centre d’action à tout le reste : l’un est Rome, « Cette dernière grandeur vivante de l’Italie, » comme l’appelait éloquemment M. Rossi, et qui pourrait bien servir de capitale à un empire ne s’étendant que des Alpes à l’Etna, quand elle en sert encore à un royaume qui a des ministres et des sujets sous toutes les latitudes du globe ; l’autre est le Piémont, nation médiocre en territoire, il est vrai, mais considérable à coup sûr quant au reste, puisqu’il n’est pas une seule des grandes affaires contemporaines, la guerre d’Orient vient d’en être la preuve, où son concours politique et militaire ne compte. Et voilà la race d’hommes qui ne peut pas par-