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diplomatiques, des crises constitutionnelles, des séditions et des réactions. Que laisse-t-elle dans les lettres et dans les arts ? Elle ne laisse point de monument sans doute, elle n’a point vu d’étoile lumineuse monter à l’horizon. Des œuvres et puis des œuvres, des livres et puis des livres ! À travers tout, c’est plutôt un mouvement suivi et permanent d’activité un peu confuse, dont le mérite est de montrer que si la vie littéraire a ses épreuves, elle ne s’arrête pas, que s’il y a bien des efforts perdus, il peut y en avoir aussi parfois de plus heureux. De tous ces livres qui se succèdent, les uns s’inspirent d’un intérêt du moment, ou racontent quelque épisode contemporain ; d’autres sont des révélations ou des documens pour l’histoire. Il en est qui dans une étude ou dans un portrait remettent en lumière quelque fragment du passé, et à son tour l’imagination, revendiquant sa place dans la marche commune, s’efforce de se donner une originalité et une nouveauté qu’elle trouverait mieux, si elle les cherchait dans la contemplation de l’idéal, si, par un élan vigoureux, elle se relevait au-dessus des malsaines influences. Rien ne serait plus difficile assurément que de coordonner des œuvres écloses sous des inspirations si diverses : elles viennent au monde et ne demandent pas mieux que de vivre au-delà de cette année qui les voit naître. Combien peu cependant secoueront la poussière que l’année en fuyant jette sur elles !

Un écrivain, M. Édouard Gourdon, s’emparant de faits à peine accomplis, raconte l’Histoire du Congrès de Paris. Sans s’élever absolument à la hauteur d’une histoire politique et définitive des récentes luttes de l’Europe, le livre de M. Gourdon n’a pas moins un mérite appréciable, celui de rassembler les grands actes diplomatiques de la dernière paix, de mêler au récit des choses connues les détails anecdotiques sur l’existence intime du congrès, de remettre enfin en un jour assez exact le mouvement de la presse, l’attitude diverse des gouvernemens, et tous ces efforts de la diplomatie, sans cesse occupée à renouer des fils mille fois rompus entre ses mains. C’est le mémorandum des derniers événemens. Dans cet ensemble de travaux du congrès de Paris, un autre écrivain, M. d’Hervey-Saint-Denys, ne prend qu’un épisode, celui des affaires de Naples, et comme pour arriver par une voie naturelle et logique aux conditions présentes, il retrace l’Histoire de la révolution dans les Deux-Siciles. Le cadre est vaste, il va de 1793 à la récente intervention diplomatique de la France et de l’Angleterre. C’est bien là l’histoire en effet, c’est du moins la suite des événemens, ce sont les faits ; seulement à cette œuvre il manque la vie, la couleur, l’art de reproduire dans ce qu’elle a d’exceptionnel, de compliqué et de confus, la destinée du royaume napolitain en Italie. Le livre de M. d’Hervey-Saint-Denys est moins une étude profonde et lumineuse qu’un résumé superficiel et rapide, qui serait plus concluant, si l’auteur ne semblait pas si persuadé qu’une apologie à peu près complète du roi Ferdinand peut être de l’histoire. Le royaume de la Basse-Italie est un des pays les moins connus, quoique la beauté de ses golfes et de son climat soit l’éternel attrait des voyageurs. Les rapports véritables de la Sicile et de Naples, le travail intérieur des classes, les luttes obscures et violentes des partis, l’inefficacité d’une législation bonne en elle-même et souvent altérée en passant par des mains infidèles, l’état des mœurs publiques, les caractères individuels qui se détachent dans cet enchaînement des choses, c’est là ce qu’il serait utile d’étudier pour savoir ce qui est possible