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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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31 décembre 1856.

Le monde marche au milieu d’un ensemble d’événemens qui passent, se succèdent et deviennent à chaque instant de l’histoire. Il échappe aux épreuves de la veille pour tomber dans les épreuves du lendemain, s’avançant toujours à pas pressés, et lorsqu’il s’arrête un moment pour se reconnaître, il a franchi une étape de plus, tout a changé de face, une année s’est écoulée, — une année de plus, qui disparaît avec l’heure expirante, comme un rêve plein de visions, qui a eu un jour pour le monde tous les prestiges de l’inconnu, et qui n’a plus rien à révéler maintenant. Tout ce qu’elle cachait s’est dévoilé heure par heure, et elle nous laisse encore une fois en présence de cet inconnu qui recommence à tous les instans. Que reste-t-il de cette période du temps à peine achevée ? Des souvenirs de lutte, une grande transaction devenue un grand objet de controverse, des conflits mal apaisés, des espérances déçues, des problèmes nouveaux. Qu’apporte à son tour cette année qui commence ? Voilà la question. C’était là aussi la question lorsque l’année qui finit s’ouvrait avec une solennité presque terrible, au bruit des armes et au milieu de l’incertitude universelle. Plus que jamais on croyait à la continuation d’une lutte redoutable ; les alliances se formaient ou se resserraient, on cherchait du regard le point vulnérable de l’ennemi, il ne restait plus qu’à savoir de quel côté se tournerait la guerre et quelle extension elle prendrait. Au lieu de la guerre, c’est la paix qui est venue, une paix prompte, rapide, et qui n’a eu qu’un malheur, celui de ne régler que la question d’Orient, lorsque bien d’autres questions avaient eu le temps de naître et de prendre rang en quelque sorte dans le conflit, lorsque la situation même du continent avait eu le temps de changer radicalement.

Il s’est trouvé en effet que cette paix, tombant au milieu d’une situation européenne complètement transformée, n’a point tardé à être le principe de difficultés nouvelles. Il a été moins facile d’interpréter le traité de Paris que de le conclure, et c’est alors qu’on a vu éclater dans un jour singulier le trouble de toutes les relations, les changemens profonds qui sont survenus