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M. de Metternich parut très satisfait des conditions préliminaires proposées par la France ; il n’hésita pas à les qualifier de très généreuses. Il annonça que le comte de Lebzeltern et le baron de Wessenberg allaient se rendre prochainement, le premier à Wilna, le second à Londres, afin d’offrir à l’empereur Alexandre et au gouvernement anglais l’intervention officieuse de l’Autriche. M. de Wessenberg signifierait au cabinet britannique que, s’il refusait de prendre part aux négociations, les intérêts anglais seraient considérés comme séparés de ceux du continent, et que l’Autriche ne songerait plus qu’à négocier une paix continentale.

Dans le moment où ces communications d’un caractère si pacifique s’échangeaient à Vienne, un envoyé russe, M. de Stackelberg, s’y présentait au nom de l’empereur Alexandre, et il avait déjà eu plusieurs entretiens avec M. de Metternich. Selon ce ministre, l’envoyé russe aurait, dans la première conférence, tenu un langage si fier, il aurait fait une peinture tellement exagérée des succès militaires du tsar, annoncé d’un air si superbe la résolution de son maître de travailler à délivrer l’Allemagne de l’oppression commune, que M. de Metternich avait été obligé de l’arrêter en lui déclarant qu’il s’abusait beaucoup s’il prêtait au cabinet impérial d’autres vues que celle de rétablir la paix, que l’empereur son maître était invariablement décidé à rester l’allié de la France, et que le recouvrement de ses anciennes provinces serait à ses yeux trop chèrement acheté au prix d’une seule campagne. « Nous ne nous plaignons pas, aurait déclaré M. de Metternich, et nous ne reconnaissons à aucun cabinet le droit de ressentir nos malheurs plus que nous-mêmes. » Il aurait ajouté que la France avait fait des propositions qui avaient reçu l’approbation de sa cour. Cette déclaration aurait vivement impressionné M. de Stackelberg, qui se serait empressé de répondre que l’intention de la Russie était bien de négocier, mais que vraisemblablement elle n’arrêterait aucune détermination avant de s’être entendue avec son alliée la Grande-Bretagne. « La démarche que vient de faire la Russie est un grand pas, dit M. de Metternich au comte Otto ; comptez sur nous : nous ne lâcherons rien, absolument rien, car nous y sommes pour le moins aussi intéressés que vous. »

Ce langage ouvert et sympathique avait complètement fasciné M. Otto. Déjà, avant ces dernières ouvertures, le 28 décembre, il écrivait : « Au milieu de l’effervescence générale des esprits contre la France, l’empereur est inébranlable. Il répugne à sa loyauté et à son cœur paternel de prêter l’oreille aux suggestions de nos ennemis. Il est mal entouré ; on aiguillonne son orgueil de prince autrichien. Au fond, l’empereur ne cherche que le repos ; il est disposé à tout faire pour l’obtenir. Après les intérêts de ses propres états, il n’a rien tant à cœur que de voir se consolider le gouvernement fran-