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Médicis qu’il était, n’avait hérité de sa famille ni le goût éclairé d’un Laurent, ni les nobles passions d’un Léon X. Il ne faut pas oublier non plus que, excepté Michel-Ange, d’ailleurs assez mal en cour à cette époque, les maîtres qui venaient d’illustrer les règnes de Jules II et de Léon X avaient tous cessé d’exister. Enfin les années qui suivirent le siège de Rome étaient-elles un moment propice aux vastes entreprises, et ne semble-t-il pas naturel que, faute de grandes ressources en tout genre, on se contentât du peu qu’on avait sous la main ? Ce joyau, si cher à Clément VII et plus cher encore à Cellini, avait au surplus en soi une certaine importance. Bien qu’il ne subsiste aujourd’hui que dans la description qu’en a donnée l’artiste, on peut, sur ce seul document, pressentir les conditions compliquées, les difficultés matérielles, et même en partie les caractères du style de ce travail. L’ensemble de l’œuvre avait les dimensions d’une main ouverte. On voyait au milieu une figure représentant Dieu le père entourée d’anges ciselés les uns en ronde-bosse, les autres en bas-relief, les autres enfin presque à plat dans l’or, suivant l’éloignement progressif des plans et la distance où apparaissait chaque groupe. Cette figure principale, assise dans l’attitude de la bénédiction, reposait sur un énorme diamant acheté autrefois par Jules II au prix de 36,000 écus. Bon nombre d’autres pierres précieuses enrichissaient le fond et le cadre de la composition, que décoraient aussi des émaux de différentes couleurs. Enfin, sur la face interne de la plaque, se dessinaient en creux et en relief des mascarons, des coquillages et divers sujets d’ornement.

Benvenuto Cellini, on le voit, avait dans l’exécution du bouton de chape de Clément VII fait acte d’orfèvre, de joaillier et de graveur. Sans doute le choix de certains objets, l’idée d’associer par exemple à une image de la Divinité des mascarons et d’autres ornemens de pure fantaisie n’indiquent ni un goût très sévère, ni un sentiment très exact des convenances morales du sujet. Le tout attesterait plutôt, et une fois de plus, ce besoin commun aux artistes de l’époque d’introduire les formules païennes jusque dans l’expression des dogmes bibliques. Quant aux procédés employés pour sertir ces pierreries, pour ciseler ces figures et pour incruster ces émaux, ils constituaient du moins un progrès, et l’on voit par tous les détails où Cellini entre à ce propos qu’il perfectionna véritablement, au point de vue technique, la méthode de ses prédécesseurs. Au point de vue technique, avons-nous dit : c’est là en effet qu’il convient de se placer pour faire à ce talent sa meilleure part. Une grande habileté de main au service d’un esprit peu étendu, mais délié, une sorte de dextérité dans les habitudes intellectuelles aussi bien que dans la pratique, tels sont les caractères qui distinguent en général