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UN
PAYSAN TURC

I.

Nous sommes en Asie-Mineure, à trois journées de marche d’Angora, dans l’humble habitation d’un paysan turc. Veut-on savoir quelle influence salutaire la vie de famille exerce encore dans quelques régions de cette Turquie menacée par tant d’élémens de ruine, veut-on connaître aussi quelles natures énergiques et naïves se conservent çà et là au milieu de la société corrompue de l’Orient, qu’on s’arrête un moment devant le modeste foyer autour duquel se grouperont les principaux incidens de cette histoire, et qui pourrait servir de modèle à plus d’un foyer civilisé.

La principale pièce de l’habitation est une grande chambre carrée, au plafond bas, aux parois percées de maintes petites fenêtres se suivant les unes les autres sans intervalle. Plancher, plafond, lambris, tout est en bois de sapin. Une immense cheminée, une estrade couverte de tapis et de matelas qui borde le mur au-dessous des fenêtres, quelques coussins devant la cheminée, deux étagères chargées de tasses, de cafetières, et des menus objets dont se compose un capharnaüm asiatique, ainsi se complète l’ameublement du riche paysan de Natolie chez lequel nous introduisons le lecteur. Sur l’un des coussins entassés près de la cheminée se tient assis le maître de la rustique demeure. C’est un vieillard grand et droit comme l’un des arbres dont sa maison est construite, aux yeux