de son père, s’est vu, malgré sa nullité personnelle, élevé à la dignité de sénateur. Son plus jeune frère ayant été tué à Novare, le gouvernement a voulu indemniser, dans le dernier survivant, cette illustre famille des sacrifices qu’elle a faits, sinon à la patrie, du moins au roi, en qui elle s’est un moment personnifiée. Celui-là seul qui n’a jamais porté les armes reçoit donc la récompense que les autres avaient méritée. Il siége au sénat, sur les bancs de l’extrême droite ; il se plaint plus haut que personne de l’attitude du gouvernement vis-à-vis de l’Autriche et du saint-siége. Il n’a du reste jamais pris et ne prendra probablement jamais la parole au sein de la noble chambre, ni même dans les commissions.
La vérité des esquisses de M. Bersezio n’est pas contestable pour quiconque connaît l’Italie. Ce qu’on peut y reprendre, c’est que, complètes en elles-mêmes, elles ne forment cependant pas un tableau complet. M. Bersezio a négligé de mettre à nu quelques-unes des plaies vives de la société italienne et de démasquer quelques-uns des caractères les plus funestes et les plus communs dans ce malheureux pays. Que les Tiburzio soient partout des exceptions, cela s’entend assez ; mais les Poggei et les Grechi sont aussi des exceptions, et ne suffisent pas à nous expliquer la triste fin de la lutte nationale. Or c’est là ce qui importe le plus. M. Bersezio semble entrer dans la voie où j’aurais voulu le voir s’engager plus avant, lorsqu’il nous peint la noblesse dissipée du marchesino et de San-Luca, ou la lâcheté fanfaronne du comte Baratoggi ; mais il fallait mieux montrer la solidarité des idées absolutistes et des sentimens anti-italiens dans les rangs d’une noblesse nombreuse, riche, puissante, que ses sympathies pour l’Autriche ont conduite à ne point prendre part à la guerre ou à ne s’y associer qu’à contre-cœur et presque en désirant le triomphe de l’ennemi ; il fallait de là descendre à ces bourgeois, plus patriotes, mais belliqueux seulement en paroles, et qui, après avoir rempli l’Italie de leurs bruyantes clameurs, s’éclipsaient prudemment lorsque ceux qui les connaissaient bien les sommaient de se faire inscrire sur les listes d’enrôlement, toujours ouvertes et trop peu remplies. Il fallait enfin pénétrer jusque dans les profondeurs du peuple, ouvriers des villes et travailleurs des campagnes, si prompts à sonner les cloches, à accourir sur le passage de ceux qui partaient pour la guerre, à les couvrir de fleurs, à les poursuivre de leurs acclamations, sauf, lorsqu’ils étaient passés, à s’en retourner à l’atelier ou aux champs, au lieu de s’armer et de les suivre. Ces dispositions déplorables, de la majorité d’un peuple qui prétendait tout faire par lui-même, — Italia farà da se, — ont été déjà énergiquement blâmées par M. César Cantù, l’habile historien ; mais puisque le roman essaie, comme c’est