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diverses fractions, il fera ce qu’a fait le cabinet du général Narvaez, et il continuera à se débattre dans la situation la plus complexe, au milieu de difficultés sans cesse renaissantes. M. Mon sera-t-il plus heureux que le général Narvaez ? surmontera-t-il ou déjouera-t-il par son habileté les embarras de toute sorte que le dernier président du conseil n’a pu vaincre ? Si le cabinet ne vit pas en bonne intelligence avec les chambres, se décidera-t-il à dissoudre encore une fois le congrès ? C’est ce qu’on ne peut dire. Toujours est-il que la situation de l’Espagne n’est point sensiblement changée. Il y a d’ailleurs pour le ministère actuel une cause de faiblesse qu’on ne peut méconnaître ; cette cause intime, essentielle de faiblesse est dans son origine. Si la politique est entrée pour quelque chose dans sa composition, elle y est entrée pour peu. En réalité, le cabinet est né de ce mouvement d’influences dont le centre est au palais. Il est venu au monde comme naissent tous les ministères depuis quelques années en Espagne, comme était né le ministère du général Narvaez lui-même, et, on l’a vu, cette origine a pesé jusqu’au bout sur la dernière administration. ch. de mazade.



ESSAIS ET NOTICES.
VAUVENARGUES - OEUVRES INEDITES.

On a si souvent parlé de Vauvenargues, que je désespérerais de fixer, même pour un instant, l’attention du lecteur sur ce sympathique et malheureux écrivain, si je n’avais à signaler une édition nouvelle qui nous surprend par l’inattendu des révélations, et qui tient plus que ses promesses. Les lettres en sont redevables à un récent lauréat de l’Académie française, M. Gilbert, qui a voulu voir, dans le prix accordé à son Éloge de Vauvenargues, moins une récompense qu’un encouragement à faire mieux connaître encore son auteur favori. Avec une ardeur et une patience dignes de cette cause, M. Gilbert s’est mis en quête de toutes les éditions, de tous les commentaires, de tous les manuscrits, et, par une confrontation intelligente autant que minutieuse, il est parvenu à se convaincre que nous possédions à peine la moitié de ce que Vauvenargues a écrit. L’autre moitié méritait-elle de voir le jour ? A cet égard, le goût de M. Gilbert ne l’a pas trompé. Sans parler de variantes nombreuses et quelquefois supérieures au texte adopté par les précédens éditeurs, sans parler, pour le moment du moins, de réflexions, de maximes, de caractères entièrement inédits, M. Gilbert nous donne la correspondance du grand moraliste, cent quinze lettres, qui mettent en pleine lumière un Vauvenargues nouveau que les plus attentifs et les plus ingénieux critiques avaient à peine entrevu. Ce n’est pas de l’écrivain, mais de l’homme que je parle : l’écrivain ne gagne à l’importante publication de M. Gilbert que de voir s’augmenter et presque doubler le nombre des pages qui le recommandent à l’admiration ou, si l’on veut, à l’estime de la postérité, tandis que la vie, le caractère, les pensées secrètes, les goûts, les souffrances de l’homme acquièrent, par l’édition nouvelle, un