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autrichiens ont bivouaqué dans l’église; ils ont brisé le vase sacré; ils s’en sont partagé les morceaux, en jetant ce qu’il contenait. La relique est perdue. A son passage, l’empereur François-Joseph a promis à la basilique de Saint-André le plus beau reliquaire que pourraient fournir les Benvenuto de Vienne. On espère qu’une autre église de Mantoue voudra bien céder un peu de ses reliques.

A Saint-André, il y a un excellent et authentique buste de Mantegna par Sperandio, et l’on peut y voir avec édification le tombeau de Pomponat. Pomponat dans une église ! l’inconséquence met la paix dans le monde.

Il y aurait bien encore à Mantoue quelques églises et quelques palais à signaler, et la maison de Jules Romain, décorée d’un Mercure en partie antique, mérite qu’on se détourne pour la voir; mais il est surtout essentiel de ne point partir sans visiter le musée des statues, que M. Valéry regarde comme le quatrième de l’Italie. Ce que j’y ai vu de mieux est peut-être un bas-relief du plus grand style où sont représentés l’aigle et les divers attributs de Jupiter. Sur un autre bas-relief très intéressant, on voit Aristote donnant une leçon au jeune Alexandre. Un corps mutilé de Vénus est si charmant, que Canova le croyait de Phidias. Un buste de Virgile est regardé comme authentique; la tête est belle et même poétique. Et comment voir sans respect et sans émotion un buste de Virgile à Mantoue? Celui d’Euripide est d’un bon travail. Des Augustes, des Agrippines, d’autres faces césariennes sont empreintes de cet air de vérité et de cette habileté de main qui caractérisent la sculpture romaine sous l’empire. On montre aussi un Amour endormi attribué à Michel-Ange, et qui aurait passé pour antique.

Le tombeau de Virgile, comme on sait, n’est pas à Mantoue. Celui de Mantegna est à Saint-André; celui de Jules Romain à Saint-Barnabé n’a pas été respecté; à Saint-Maurice, on peut lire plus d’une inscription tumulaire en l’honneur d’officiers français morts ou ensevelis à Mantoue lors de nos guerres héroïques. On dit que la pieuse pensée de rassembler là leurs restes honorés est due à un de leurs illustres chefs, le général Grenier. Que de souvenirs se pressent dans ces cités historiques de la pauvre, de la riche Italie!

Un voiturin nous conduisit en une demi-journée à Parme, en passant par le duché-village de Guastalla. Aux portes de Parme, nous reconnûmes sur-le-champ que nous étions dans un petit état italien. Du ton le plus révérencieux, un douanier s’épuisa à nous demander si nous n’avions rien à déclarer. Il ne se contentait pas de notre réponse négative, et répétait incessamment sa question; mais il eût été évidemment désolé d’avoir à nous visiter, et parut soulagé d’un grand poids quand nous nous avisâmes enfin de lui offrir une livre autrichienne (87 centimes). Il ne manqua pas alors de nous