Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 11.djvu/600

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mières observations sérieuses sur l’aimantation du globe. Quand nos relations indirectes avec la Chine eurent donné aux nations actives de la partie occidentale de l’ancien monde la boussole avec l’imprimerie et la poudre de guerre, on ne se contenta plus du grossier mécanisme primitif des immuables habitans du Céleste-Empire. La boussole (bussola, petit cabinet vitré, petite caisse vitrée, en prenant le contenant pour le contenu) fut installée à bord des navires, et, quand les nuages cachèrent le ciel, devint un guide fidèle pour les marins de toutes les nations. Puis de longues traversées, telles que celle de Christophe Colomb en Amérique et les voyages des Portugais aux grandes Indes, montrèrent que ses indications étaient différentes suivant les divers points du globe. Plus tard encore, on sut que, pour un même lieu, la direction de l’aiguille changeait de siècle en siècle. Ainsi un barreau aimanté, suspendu librement, se dirigeait, au siècle de Louis XIV, droit au nord par une de ses pointes, et droit au sud par l’autre. C’était en 1666, l’année de la fondation de l’Académie des Sciences. Depuis, l’aiguille aimantée s’était, jusqu’en 1816, graduellement déplacée de vingt-deux degrés et demi vers l’ouest. Enfin, depuis ce temps, elle a repris sa marche pour retourner vers le méridien et se rapprocher de la ligne nord et sud.

Si Kepler, qui assimilait la terre à un grand animal vivant, suivant l’expression d’Ovide :

………… Est animal tellus et vivit.


avait connu la théorie électrique du magnétisme terrestre, il n’eût pas manqué de voir dans le fluide électrique le fluide nerveux et vital de notre planète, et de cette assimilation il eût peut-être tiré quelque conclusion inattendue et vraie, comme celle qu’il a déduite si admirablement de considérations encore plus étranges.

Voici le plan que j’adopte pour l’exposé des diverses particularités de l’aimantation du globe. Je poursuis la comparaison des effets produits par notre planète avec ceux que produit un aimant ordinaire, en tenant compte des circonstances de distance et de grandeur qui en font varier les effets divers, sinon dans leur essence, au moins dans leurs circonstances de détail. Nous examinerons donc, successivement dans le grand aimant terrestre son influence attractive sur le fer, l’aimantation qu’il détermine, la direction horizontale qu’il donne à l’aiguille aimantée, l’inclinaison plongeante vers le pôle qu’il la force à prendre dans l’état libre, la force ou l’intensité avec laquelle il dirige cette aiguille, la position des pôles magnétiques où cette aiguille est verticale, celle des diverses lignes magnétiques relatives à la direction horizontale, à l’inclinaison, à l’in-