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trouver un écoulement chez elle. Cependant, pour ôter tout prétexte à la contradiction, j’estimerai à plus du double, à 300,000 kilog., la masse totale de l’or qui devra, pendant la période décennale qui s’ouvre, se placer dans l’empire d’Autriche et dans les autres états où l’on éprouve des besoins analogues.

Voilà pour le premier des débouchés extraordinaires qui se présentent à l’or de la Californie et de l’Australie et à celui dont il y a lieu de prévoir l’extraction dans la Russie boréale.

Que faut-il penser du second, de celui qui serait ménagé par les développemens toujours croissans du luxe ? Sur ce point, il ne faut pas qu’on se fasse illusion ; le siècle est moins fastueux qu’on ne le représente, ou plutôt il ne fait pas consister son faste à se donner beaucoup d’objets en or. Il aime la dorure, et à en juger par Paris, il la répand dans les appartemens, sur les meubles, les boiseries et les plafonds ; mais en fait de bijoux, il n’en fait d’or que de très légers. On fabrique beaucoup de bagues en or, de boîtes de montres en or, mais très peu de ces articles qui exigeraient une quantité un peu forte de ce métal. La preuve en est écrite dans les relevés des bureaux dits de garantie chez les différens peuples civilisés.

Qui ne supposerait que dans la Grande-Bretagne, où une aristocratie opulente fait volontiers étalage de ses richesses, et où, depuis la paix de 1815, les fortunes commerciales se sont agrandies et multipliées à un degré surprenant, la fabrication des ustensiles en or a dû prendre un accroissement considérable ? C’est pourtant le contraire qui est vrai. J’ai sous les yeux le relevé des opérations des bureaux anglais de garantie depuis le commencement du siècle, jusques et y compris 1850, qui a été publié par M. Porter dans son excellent ouvrage du Progrès national. D’après ce tableau, la progression de la fabrication des articles en or est restée, qui aurait pu le croire ? en arrière de celle de la population. De la première période quinquennale du siècle à celle qui se clôt en 1850, l’augmentation de la quantité d’or qui a passé par ces bureaux est de 50 pour 100 ; pendant le même intervalle, la population a doublé, et puis, si l’on se rend compte de la quantité d’or que cette fabrication exige, on est confondu de la trouver aussi faible. C’est un atome en comparaison de l’extraction totale. Pendant la dernière période quinquennale du demi-siècle, la moyenne annuelle n’a été que de 7,636 onces (216 kilogrammes). Indépendamment des indications de M. Porter, j’ai pu me procurer les chiffres relatifs aux deux exercices les plus voisins (1855 et 1856). La moyenne est de 295 kilogr., en comptant ce qui est destiné à l’exportation. Il faut dire que plusieurs articles, tels que les boîtes de montres, sont exclus de ce relevé ; mais qu’on double le total, qu’on le quadruple, qu’on le dé-