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s’éleva peu au-dessus de ce chiffre jusqu’à ce que l’exploitation des mines d’or de l’Oural, et surtout de celles de la Sibérie, qui de vinrent importantes vers 1840, fût venue, avec le concours d’autres extractions secondaires, la porter à plus du double. En ce moment, on peut évaluer en nombres ronds l’approvisionnement fourni aux peuples chrétiens à 275,000 kilogrammes, sinon à 300,000. L’augmentation, depuis quarante ou cinquante ans, est donc dans le rapport de 1 à 14 ou à 15. Pour l’argent au contraire, il n’y a presque pas de changement : la production, au commencement du siècle, était de 900,000 kilogrammes; on estime que présentement elle est d’un million.

On peut exprimer autrement le changement qui s’est révélé dans la production de l’or. La contrée qui, jusqu’à l’exploitation des mines de la Sibérie, était, pour les peuples de l’Europe, le principal foyer de la production de l’or, l’Amérique tout entière depuis le premier voyage de Christophe Colomb jusqu’à la découverte des mines de la Californie, c’est-à-dire pendant 356 ans (de 1492 à 1848), et en comptant l’or retiré des lingots d’argent aussi bien que celui des mines d’or proprement dites, n’a donné que 2,910,000 kil. de métal fin, soit 10 milliards 126 millions de francs, le franc étant, d’après la loi française du 7 germinal an XI, de 29 centigrammes d’or fin. Aujourd’hui la production de l’or approchant de 300,000 kilog., c’est qu’en une seule année les peuples civilisés reçoivent de ce métal le dixième environ du total qui en avait été fourni par l’Amérique depuis le premier départ de Christophe Colomb jusqu’à 1848.

On peut présenter sous une autre forme plus saisissante peut-être la puissance productive des gisemens aurifères de la Californie et de l’Australie. Ce serait d’indiquer la quantité de métal qu’un mineur en extrait moyennement par journée de travail. A l’égard de la Californie, nous avons le rapport du docteur Trask, dont un extrait a été donné par M. L’ingénieur des mines Delesse, dans les Annales des Mines, 3e livraison de 1856 (Ve série, t. IX, p. 649)[1]. On y voit qu’en 1854, par un travail de huit mois, chaque mineur a eu une quantité d’or évaluée à 700 dollars, et faisant environ 1,100 grammes d’or. A vingt-cinq journées par mois, ce qui est vraisemblablement exagéré, c’est par jour de travail effectif une rétribution moyenne de 5 grammes 1/2 d’or, qui, au taux de la monnaie française, feraient 19 francs. Un jeune officier de la marine française qui, au retour de la seconde campagne du Kamtchatka, a visité l’intérieur de la Californie en août 1855, et s’y est appliqué à recueillir

  1. Voyez page 80 du rapport de M. Trask.