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partie de ce qui nous reste de Thèbes ou de Luxor! mais, comme dit le poète, les tombeaux eux-mêmes ont leurs destins.

Les églises de Turin ne méritent pas une attention particulière. Elles sont en général assez modernes, ou, comme on dit, modernisées. On chercherait en vain dans le nombre quelque modèle de cet ancien style romain d’architecture qu’on appelle aussi lombard, et qui, sans perdre un fonds de simplicité modifié par le style roman et même par le style allemand, a produit ce style mixte contemporain des plus célèbres œuvres du genre gothique dans les pays situés au nord des Alpes. Au sud de cette ligne, on ne doit pas s’attendre à rencontrer aucune de nos diverses architectures gothiques dans leur pureté, ni même avec l’ensemble de leurs caractères propres. Sans chercher à distinguer entre elles et en confondant un peu les siècles et les écoles, on sait que l’épithète de gothique nous représente surtout le style des églises de Chartres, de Rouen, d’Amiens, de Bourges, de Notre-Dame de Paris. C’est là pour nous en général l’architecture sacrée par excellence, et dans un temps peu éloigné de nous on ne voulait pas admettre qu’il y en eût d’autre. Après l’avoir dépréciée depuis le XVIIe siècle, on s’est mis, dans celui-ci, à l’identifier avec la religion, à ce point qu’il faudrait que l’art chrétien eût été peu connu en Espagne, moins encore en Italie, tout à fait inconnu dans cette partie du monde où le christianisme est né, dans cet Orient d’où il s’est levé sur le monde : exemple assez piquant de la témérité et de la vanité de ces doctrines de critique et d’esthétique dont l’esprit est toujours si pressé d’élever le capricieux échafaudage! On commence à rentrer dans le vrai, et, malgré la vogue du moyen âge, on hésite davantage à regarder Sainte-Sophie de Constantinople et Saint-Pierre de Rome comme des monumens païens; mais en dehors même du style byzantin et de l’art de la renaissance, le style antérieur des édifices religieux en Italie n’offre guère d’échantillons du gothique orné et flamboyant, ni généralement de cette combinaison systématique du haut avec l’étroit, du solide avec le mince, de cet assemblage d’arceaux en ogive, de colonnettes longues et engagées en faisceau, de flèches dentelées, de bordures à jour et de tous les détails d’une ornementation aussi variée dans ses formes que le règne végétal. Le gothique italien est en général plus simple d’aspect. Il reproduit souvent les grands vaisseaux de nos cathédrales, mais il proportionne davantage la hauteur à la largeur. Il complique moins les moyens d’effet, et ne craint pas les vastes surfaces massives et planes. C’est avec un goût moins fantasque, moins tourmenté, qu’il tempère et pare la sévérité du demi-jour des grands intérieurs.

Cependant, quand je parle de simplicité, c’est plutôt sous le rap-