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À côté de ces étranges créatures figurent les plantes les plus caractéristiques de la flore qui existait en même temps sur la terre, et des pierres tirées des couches dans lesquelles les restes de ces animaux se retrouvent engloutis. Les lacs géologiques du Crystal Palace sont en outre entourés de tout ce qui peut compléter l’illusion, désordre systématique, sections de couches, matériaux bruts, débris de rochers, cavernes, qui donnent bien l’idée d’un monde éteint. Vous ne contemplez pas seulement ici le squelette, mais les formes extérieures sous lesquelles on suppose que les anciens animaux ont vécu. Il y a sans doute beaucoup à dire contre la témérité de cette entreprise qui tend à faire de la géologie une science d’imagination. Plusieurs des animaux représentés dans les îles du Palais de Cristal seraient peut-être bien étonnés, s’ils pouvaient revenir à la lumière, et s’ils avaient les moyens de juger par eux-mêmes des traits qu’on leur attribue : hâtons-nous pourtant de dire que ces restaurations ne sont point arbitraires. Les animaux reconstruits ont été choisis en général parmi ceux dont le squelette entier, ou presque entier, a été retrouvé à l’état fossile. La forme superficielle, les contours, la peau de l’animal, ont été ajoutés à cette base ; mais on s’est servi pour cela des indications fournies, dans plus d’un cas, par le moulage même de la nature. Des parties de tégument pétrifié, des plaques osseuses ont guidé l’artiste, qui a scrupuleusement copié ces vestiges de la vie. Il y a, il est vrai, des animaux perdus, dont le crâne seulement et quelques parties de la charpente osseuse ont été découverts : on s’est souvent borné, dans ce cas, à reproduire la tête du monstre ; cette tête sort de l’eau, dans laquelle le reste du corps est censé plonger. L’artiste qui a présidé à cette résurrection des animaux éteints est M. Waterhouse Hawkins. Il a été aidé dans son œuvre par les lumières des naturalistes, et le célèbre professeur Richard Owen a consenti à couvrir de son autorité ce que cet essai pouvait avoir de hasardeux. Peut-être une telle association de la science et de l’art est-elle après tout un premier pas dans une voie féconde. Je me demande, par exemple, si la flore grandiose de l’âge carbonifère, dont nous possédons tous les débris, ne fournirait pas au pinceau des paysagistes des pages intéressantes.

On le voit, les matériaux abondent, surtout pour celui qui veut limiter ses recherches à la formation de l’Angleterre. Nous sommes maintenant préparés à interroger le pays lui-même, et sur notre route, nous rencontrerons les travaux, les doctrines des principaux géologues anglais, MM. Murchison, Hugh Miller, Richard Owen et Lyell. L’histoire de cette partie de la terre, qui, après avoir subi d’incroyables changemens, constitue aujourd’hui les îles britanniques, peut se diviser, comme l’histoire même de la nation, en trois