Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 11.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des divisions qu’il est parvenu à établir ne seront certainement jamais modifiées. Cependant l’histoire naturelle des animaux inférieurs a fait aujourd’hui de tels progrès, les catalogués sont encombrés d’une telle multitude d’êtres dépourvus de ces caractères anatomiques simples particuliers aux classes les plus élevées, qu’il est de toute nécessité de chercher un nouveau fil pour se conduire dans un dédale qui s’agrandit chaque jour. Ce fil, suivant M. Agassiz, est l’embryogénie comparées En cherchant à préciser les lois de cette science nouvelle, à montrer de quelle importance est l’étude des changemens que subit chaque être depuis le moment où il commence à vivre jusqu’à celui où il arrive à son état permanent, le célèbre naturaliste a introduit dans la zoologie des considérations aussi neuves que fécondes.

Voici quel est le caractère essentiel et vraiment original du grand travail de classification tenté par M. Agassiz. Le tableau des divisions hiérarchiques établies par le professeur de Cambridge peut servir de tableau chronologique destiné à représenter l’histoire du règne animal. On y trouve les principaux groupes organiques rangés dans l’ordre même où ils ont apparu sur la terre. La foi du naturaliste suisse dans cette concordance entre la hiérarchie animale et la succession chronologique des êtres est si profonde, qu’à défaut d’autre secours il n’hésite pas à déclarer que l’ordre d’apparition de deux familles en trahit suffisamment le degré d’importance zoologique. Dans un remarquable discours prononcé en 1850 à Charlestown à la réunion de l’association américaine pour l’avancement des sciences, M. Agassiz s’exprimait ainsi à ce sujet : « J’irai jusqu’à dire que le temps viendra où l’âge relatif des fossiles, entre certaines limites, sera un guide aussi sûr que les faits dérivés de l’étude de leur structure, pour indiquer la position normale qu’ils occupent dans le système de la nature, tant sont intimes les rapports qui unissent entre elles toutes les parties du plan admirable que nous présente la création. »

Jusqu’à quel point les découvertes paléontologiques modernes justifient-elles les assertions hardies de M. Agassiz ? Y a-t-il dans chacun des groupes organiques un parallélisme constant entré l’ordre de succession chronologique des êtres et la classification naturelle ? Si cette corrélation est générale, les représentans des divers types organiques doivent être d’autant plus imparfaits et revêtir des formes d’autant plus rudimentaires, qu’on les rencontre dans des terrains plus anciens.

L’embranchement animal le plus élevé, qui comprend sous le nom commun de vertébrés les mammifères, les oiseaux, les reptiles et les poissons, fournit les exemples les plus nombreux et les plus connus à l’appui de la doctrine du développement graduel des formes organiques,