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élections dernières, comme par un ressouvenir des luttes d’autrefois. Les affaires intérieures de la France n’ont pour les animer ni les événemens extraordinaires, ni les discussions ardentes des partis. Le voyage de l’empereur à Osborne appartient à la politique extérieure ; la session des conseils généraux, qui va prochainement avoir lieu, est du domaine administratif. Que reste-t-il ? Une fête publique aujourd’hui, des fêtes universitaires et académiques il y a peu de jours. Tous les ans, à cette même époque, revient cette grande journée pour la jeune et frémissante population des lycées, la distribution des prix du grand concours dans la vieille Sorbonne. C’est comme une image anticipée et inoffensive de toutes les émulations et de toutes les luttes du monde ; c’est la lutte dans sa primitive et généreuse ardeur, sans les coups meurtriers et les blessures mortelles. Ici du moins la politique n’a point de place ; il n’y a que la joie des mères et l’orgueil des familles. Tout au plus l’esprit méditatif se surprend-il à chercher comme une lueur de l’avenir dans le regard intelligent et ouvert de cette jeunesse animée par un jour de fête, car enfin là, dans cet étroit espace, se trouvent des enfans qui auront un rôle sur la scène publique. Cette fois comme de coutume, le ministre de l’instruction publique était là, ayant à ses côtés le cardinal archevêque de Paris et les chefs principaux de l’Université. L’ambassadeur de Perse était présent pour voir comment on fait des hommes en France. On a prononcé le discours latin suivant la tradition, et la solennité a été marquée surtout par le discours du ministre de l’instruction publique, discours très net en ce sens qu’il dit sans détour la pensée de l’état sur l’enseignement actuel et sur le rôle dévolu au professorat. La politique était absente, disions-nous ; ne s’est-elle pas glissée par hasard, elle aussi, dans la fête ? M. le ministre de l’instruction publique a parlé aux professeurs en chef de l’Université, traçant des devoirs, indiquant la mission de l’enseignement nouveau, et il a parlé aux élèves en homme politique, en publiciste esquissant en traits rapides toute notre histoire contemporaine. Assurément les soixante dernières années sont là en quelques lignes pour qui sait l’histoire et peut la recomposer ; seulement le tableau eût-il été moins complet et la jeunesse du grand concours se serait-elle retirée moins bien instruite de ce qu’elle doit savoir, lors même que les souvenirs d’anciens gouvernement n’eussent point été évoqués devant cette assemblée frémissante, tout entière à la joie de la récompense après le travail ?

Aussi bien que l’Université qui couronne la jeunesse dans sa fleur, l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, dans une sphère plus haute, a eu tout récemment sa distribution de prix. Des classes diverses de l’Institut, l’Académie des Inscriptions n’est pas la plus bruyante ; elle n’attire d’habitude ni par les luttes éloquentes ni par l’éclat exceptionnel de ses concours ; elle se tient dans son rôle modeste et utile. Il n’est pas moins vrai cependant que là se produisent des travaux d’un savoir étendu, d’une érudition patiente et scrupuleuse, embrassant tous les détails et jusqu’aux parties les plus inconnues de l’archéologie, de la numismatique, de la géographie historique. Il se peut que ces travaux consacrés à des choses et à des faits dont l’histoire ne s’occupe pas, comme on l’a dit, n’aient pas même au dehors le retentissement qu’obtiennent souvent les œuvres les plus légères. On les connaît