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son intérêt. N’anticipons pas toutefois sur les observations que nous paraît devoir provoquer l’appréciation impartiale des faits accomplis. Commençons par établir les données qui permettent de remplacer les hypothèses par des chiffres, et les supputations hasardées par un calcul mathématique.


II

La loi des finances de 1850 a prescrit une nouvelle évaluation des ressources que présente la propriété immobilière. Un pareil travail avait été accompli en 1821, en vertu d’une loi de 1818 ; les résultats obtenus à trente années d’intervalle abondent en enseignemens précieux : il suffit de les mettre en regard pour faire écrouler bien des systèmes et pour répondre à bien des déclamations.

Un fait capital se présente d’abord : au dire des adversaires de notre loi civile, la France devait aller en s’appauvrissant sous l’influence fatale de la division des héritages. Or la valeur de la propriété immobilière, estimée en 1821 à 39,514,000,000 de francs, se trouve portée en 1851 à 83,744,000,000 de francs. Une partie de cet énorme accroissement provient, il est vrai, de la base différente d’évaluation admise aux deux époques. En 1821, le revenu net avait été capitalisé sur le pied de 4 pour 100, tandis qu’en 1851 cette capitalisation a eu lieu seulement sur le pied d’un peu plus de 3 pour 100 (3 fr. 16 c.) ; mais, en maintenant le mode suivi en 1821, on arrive encore à un total de 66 milliards pour la valeur vénale de la propriété immobilière, ce qui donne un accroissement absolu de plus de 50 pour 100. — Le revenu net de la propriété s’est élevé de 1,580,597,000 fr. à 2,643,366,000 fr., en présentant une augmentation de 67 pour 100.

Il serait difficile de rien ajouter à l’éloquence décisive de ces chiffres ; que pèsent en présence de ce résultat les terreurs chimériques et les sophismes passionnés ?

L’augmentation moyenne du revenu territorial a été, durant les trente années, de 1821 à 1851, de 2,2 par an, et celle de la valeur vénale, en tenant compte de la diminution du taux de la capitalisation, de 3,6 par an. Qu’on ne s’étonne donc pas de la constance avec laquelle les capitaux disponibles ont, jusqu’à ces derniers temps, recherché le placement territorial. En dehors des avantages d’opinion et de sentiment que présente la propriété du sol, comparée à l’avoir mobilier, il faut aussi tenir compte de l’accroissement, en quelque sorte virtuel, de la, valeur du bien possédé.

Nous devons faire remarquer qu’une partie notable de l’augmentation du prix vénal de la propriété immobilière provient de constructions